Economies d'énergie: la vision des Suisses en 1973

La guerre du Kippour a provoqué une flambée des prix du pétrole, en 1973.
La guerre du Kippour a provoqué une flambée des prix du pétrole, en 1973.
Pierre Cormon
Publié le mardi 05 septembre 2023
Lien copié

#choc pétrolier L’huile de chauffage est contingentée, mais les efforts de rationalisation des entreprises ne sont pas encouragés par des programmes.

Vous devez faire des efforts pour optimiser l’énergie que vous consacrez au chauffage? Les Suisses sont déjà passés par là en 1973. A la suite de la guerre du Kippour entre Israël, d’une part, et la Syrie et l’Egypte, de l’autre, les pays arabes producteurs de pétrole augmentaient unilatéralement leurs prix et réduisaient leur production. Le baril a quadruplé en cinq mois. L’Ordre professionnel, ancien nom d’Entreprise romande, s’inquiète d’abord modérément de la situation. «Pétrole, la fin d’un règne?» titre l’édition du 25 octobre 1973. Pour le chroniqueur Mercure, la hausse des prix incitera à se tourner davantage vers l’électricité.

Or noir

La «crise de l’or noir» fait l’objet d’une page entière le 15 novembre. On y retrace l’histoire du pétrole et y souligne la dépendance dans laquelle cette énergie a placé l’Occident à l’égard des pays arabes. «Le règne de l’énergie à bon marché est définitivement terminé», conclut le journaliste. «La nécessaire reconversion, intervenant plus tôt qu’on ne le souhaitait, nous a été imposée par les pays producteurs de pétrole qui nous ont, dans ce sens, rendu service.» L’inquiétude croît rapidement. Le Conseil fédéral instaure les dimanches sans voiture et contingente les huiles de chauffage à usage domestique. «Les économies de chauffage sont insuffisantes», s’alarme L’Ordre professionnel le 29 novembre. «L’insouciance générale, l’inconscience même (des locataires font pression sur les concierges pour qu’ils forcent le chauffage) risquent de coûter très cher.»

Dilapidation

«Le maintien d’une température à 20°C dans les immeubles et la fourniture d’eau chaude sans aucune restriction est de l’aberration», confie un négociant en combustibles au journal, la semaine suivante. «Il est absolument incompréhensible qu’aucune restriction ne soit portée à la consommation d’eau chaude. Si on continue de la dilapider, jusqu’à quel point faudra-t-il abaisser la température pour réaliser les économies requises par le contingentement? Probablement jusqu’à quinze, voire à douze degrés!» Le sujet revient fréquemment dans L’Ordre professionnel, pendant tout l’hiver. On examine la possibilité d’exploiter du pétrole en Suisse, on explique sa formation, on discute de nouvelles formes d’énergie, les ramoneurs donnent des conseils pour régler et entretenir sa chaudière, un régisseur explique qu’un meilleur réglage des installations permet de réaliser des économies substantielles, etc.

Conseils généraux

Par rapport à la période actuelle, le rôle des autorités est plus restreint. Elles fixent des objectifs, édictent des restrictions. Pour le reste, c’est aux consommateurs – entreprises, ménages – de se débrouiller. Les programmes comme éco21, ProKilowatt ou SuisseEnergie n’existent pas encore. Avec les années, les préoccupations relatives à l’énergie s’amenuisent, avant de prendre une nouvelle vie avec la montée des inquiétudes environnementales. Le canton de Genève fait figure d’exemple. Il est parvenu à réduire sa consommation d’énergie par habitant de 16% entre 2010 et 2021, contre 2% dans l’ensemble de la Suisse. C’est notamment l’effet du programme éco21.

Articles en lien

insérer code pub ici