Le modèle de la formation professionnelle suisse offre de nombreux débouchés

L’apprentissage convient à une majorité de jeunes, en particulier le mode dual qui présente l’avantage de combiner théorie et acquisitions de compétences de terrain. Photo Olivier Vogelsang
L’apprentissage convient à une majorité de jeunes, en particulier le mode dual qui présente l’avantage de combiner théorie et acquisitions de compétences de terrain. Photo Olivier Vogelsang Olivier Vogelsang
Flavia Giovannelli
Publié vendredi 20 septembre 2024
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#Apprentissage Une majorité de jeunes en Suisse continue de privilégier la voie de la formation professionnelle initiale.

Fidèle au principe «pas de diplômes sans débouchés», «pas de débouchés sans diplômes», le système de l’apprentissage a fait ses preuves. En cette rentrée, environ vingt mille places d’apprentissage sont encore disponibles, une estimation similaire aux années précédentes.

L’an dernier à la même époque, plus de 76000 contrats d’apprentissage avaient été signés, portant à plus de 210000 jeunes le nombre total d’apprentis en Suisse. Un chiffre significatif, témoignant de l’intérêt constant porté par les jeunes pour cette voie professionnelle1. Alors que les études académiques semblent plus valorisées, en réalité, elles souffrent d’être parfois en décalage avec le marché, retardant l’entrée dans la vie professionnelle des étudiants parfois au-delà de la trentaine. C’est pourquoi l’apprentissage convient toujours à une majorité, en particulier le mode dual qui présente l’avantage de combiner théorie et acquisitions de compétences de terrain. Les employeurs, qu’ils soient des PME, de grandes entreprises ou des multinationales, apprécient de pouvoir intégrer de nouveaux talents en fonction de leurs besoins spécifiques. De leur côté, les apprentis bénéficient d’une expérience concrète qui renforce leur employabilité. Ce modèle permet également de maintenir un faible taux de chômage chez les jeunes, grâce à une bonne adaptation aux évolutions. De nombreuses études le confirment, dont l’ouvrage Le mirage des longues études, rédigé de Rudolf H. Strahm2, qui pourfend au passage quelques idées reçues et montre ainsi l’efficacité du système.

Mieux communiquer

Certains secteurs jugés plus exigeants ou même durs, tels que la construction, la gypserie-peinture ou le transport peinent encore à pourvoir toutes leurs places. «Nous devons mieux communiquer sur la transformation de ces métiers, qui sont aujourd’hui plus attractifs grâce à leur modernisation», affirme Laurent Baechler, responsable de la formation professionnelle à la FER Genève. Il déplore que certains prescripteurs, notamment les parents, poussent systématiquement leurs enfants vers des études supérieures et commettent de ce fait des erreurs d’orientation. Ils risquent ainsi de passer à côté d’une alternative solide. Car obtenir un certificat fédéral de capacité (CFC) prend généralement quatre ans, une durée suffisante pour mûrir et acquérir un bagage solide. De plus, le système est suffisamment agile pour offrir diverses possibilités de perfectionnement par la suite. Selon Frank, Sobczak, directeur formation à la FER Genève, l’enjeu principal réside dans la capacité des formations initiales à s’adapter constamment aux évolutions sociales et technologiques, qui s’accélèrent. Il espère que l’apprentissage ne tombera pas dans le piège d’une hyperspécialisation, susceptible de nuire à la souplesse du modèle suisse de l’apprentissage.

1 Les chiffres de 2024 ne sont pas encore communiqués.

2Le mirage des longues études, Rudolf H. Strahm, est paru aux éditions Slatkine en 2016.


Le suivi par les formateurs sous la loupe

Une étude menée par des chercheurs de la Haute école fédérale en formation professionnelle (HEFP) révèle les conditions pour que les apprentis obtiennent de bons résultats. Sans surprise, la qualité de l’encadrement a une influence directe. Jürg Schweri, l’un des auteurs, détaille ses conclusions.

Pourriez-vous nous en dire plus sur les conditions favorisant le succès?
Il faut tout d’abord une définition claire des objectifs d’apprentissage avec les apprentis. Ensuite, une bonne planification des unités d’enseignement, des consignes claires et des tâches permettant aux apprentis de travailler et de s’exercer de manière autonome. Il faut également laisser les apprentis trouver leurs propres solutions lors d’une tâche, veiller à ce que celles-ci soient variées, leur donner régulièrement un retour sur les résultats du travail, avoir une vue d’ensemble de toutes les phases du processus de production.

Quel est l’échantillonnage représentatif choisi lors de l’étude?
Trois mille sept cents entreprises ont été interrogées dans le cadre de l’étude portant sur les coûts et les bénéfices de la HEFP. Tirées au sort à partir du registre des entreprises et des établissements de l’Office fédéral de la statistique, les entreprises interrogées couvrent toutes les branches des secteurs secondaires et tertiaires; elle ne couvre donc pas l’agriculture. Toutefois, certaines analyses de la qualité de la formation, basées sur les données de l’étude coûts-bénéfices relatives à l’année d’apprentissage 2016-2017, ont uniquement pris en compte les apprentis des quarante professions principales, qui représentent une grande partie des contrats d’apprentissage en Suisse.

Que dit cette étude sur l’importance de la formation pratique?
L’étude révèle que les apprentis réussissent davantage leur apprentissage dans les entreprises offrant une meilleure qualité de formation. Nos analyses montrent également que la qualité de la formation est meilleure dans les entreprises où les formateurs et les formatrices disposent de plus de temps pour la formation et élaborent leurs propres programmes sur la base des plans de formation nationaux. C’est également le cas des entreprises formatrices qui sollicitent davantage leurs apprentis pour des travaux plus exigeants que des tâches élémentaires ou de simples exercices. Ces résultats suggèrent bien sûr d’améliorer la qualité de la formation dans les entreprises, en augmentant d’une part les ressources consacrées à la formation, comme le temps accordé aux formateurs et aux formatrices, et d’autre part en optimisant les processus de formation. Toutefois, nous n’avons pas directement étudié les mesures permettant d’y parvenir de manière efficace et efficiente. n 

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