Le réemploi gagne du terrain

La Halle 118 à Winterthour: une projet pionnier de Baubüro in situ, qui a poussé les limites du réemploi à l'extrême.
La Halle 118 à Winterthour: une projet pionnier de Baubüro in situ, qui a poussé les limites du réemploi à l'extrême.
Flavia Giovannelli
Publié vendredi 25 août 2023
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#Construction Sous l’impulsion des exigences de durabilité, architectes et ingénieurs misent davantage sur le réemploi de matériaux.

Le défi est clair: certaines ressources sont en pénurie, tandis que les déchets s’accumulent. Le secteur de la construction est un des principaux responsables de ce paradoxe. Le gaspillage de tout ordre sur les chantiers est l'un des facteurs à prendre en considération. Face à cette réalité, le réemploi d’éléments de construction émerge comme une stratégie primordiale. Cette démarche reste toutefois plus complexe dans ce domaine que dans ceux du mobilier ou des vêtements. 
Avant l’ère de l’industrialisation, les matériaux choisis étaient essentiellement locaux et le réemploi était la norme pour des raisons économiques. La modernité a depuis instauré une économie linéaire, qui perdure. Ce n’est que récemment que les acteurs concernés ont commencé à se tourner à nouveau vers le réemploi, encouragés par les préoccupations climatiques et la difficulté à trouver des ressources. 
Eloignées d’un mode de consommation désormais critiqué, les approches visant à donner une nouvelle vie aux éléments anciens nécessitent un changement de paradigmes impliquant toutes les parties prenantes. 
Tout d’abord, il est primordial d’envisager la déconstruction plutôt que la démolition. Cela signifie favoriser les transformations sélectives et explorer toutes les possibilités d’utiliser les matériaux disponibles afin de réduire les déchets. Il est également capital d’apprendre à trouver de nouveaux équilibres, à savoir déterminer quelles opérations valent la peine d’être entreprises. Les questions relatives aux coûts engendrés – en termes financiers ou en énergie grise – devront être résolues. Ces évolutions entraîneront le besoin de nouvelles compétences et donc de formations. 
En Suisse, le réemploi tel qu’il est actuellement mis en oeuvre doit encore gagner du terrain. Il est crucial d’envisager les villes comme des mines potentielles de matériaux, où les architectes pourront trouver des ressources inattendues. Pour mieux identifier l’état des stocks de ressources immenses, des recherches sont menées au laboratoire SXL de l’EPFL Fribourg. Plusieurs initiatives se concentrent sur la création de bases de données qui permettront de mieux coordonner les efforts. Plusieurs plateformes en ligne existent déjà, ayant pour objectif de valoriser les matériaux de construction, comme par exemple salza.ch et materiuum.ch.
D’un point de vue sociétal, les architectes d’aujourd’hui trouvent un regain d’intérêt pour leur métier, car le réemploi exige d’eux davantage de créativité et moins de routine. 
Si de nombreux professionnels parient sur la généralisation de ces approches, beaucoup d’obstacles restent à surmonter. Parmi ceux-ci, des défis pratiques comme le stockage et le transport des matériaux. Des contraintes administratives ou légales compliquent également la transition. Ainsi, des voix s’élèvent pour réclamer des mesures plus engagées de la part des autorités. Il serait aussi possible de promouvoir de telles réalisations grâce à des labels. Enfin, la population aura un rôle non négligeable à jouer pour démocratiser cette pratique. 
 

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