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Négociations avec l’UE: une approche ciblée et souveraine sur l’immigration

Flavia Giovannelli Publié jeudi 22 mai 2025

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C’est indéniablement un succès de négociation qu’a obtenu la Suisse en définissant, dans le cadre des bilatérales III, les critères d’activation de la clause de sauvegarde. Ce mécanisme renforcé offre à la Confédération les moyens de réagir en cas de perturbations graves sur le plan économique ou social liées à l’immigration.
La Suisse pourra désormais activer ce mécanisme de manière autonome, avec une latitude bien plus grande qu’auparavant. Une procédure de consultation avec le Comité mixte Suisse–UE est prévue, dans des délais courts - réduits à trente jours en cas d’urgence. Si aucun accord n’émerge, un tribunal arbitral paritaire pourra être saisi pour vérifier si les conditions objectives d’activation sont bel et bien réunies.
Les mesures de protection prévues restent respectueuses du principe fondamental de libre circulation. Mais elles offrent un éventail d’outils gradués: du renforcement des contrôles sur les conditions de travail et les salaires jusqu’à, en dernier recours, l’introduction de contingents temporaires. Une approche à la fois souple, réactive et ciblée.
Dans ce contexte, il importe de distinguer clairement cette avancée structurante de l’initiative Pas de Suisse à 10 millions, portée par une logique de repli. 
Là où cette dernière invoque une peur symbolique fondée sur des projections démographiques, les bilatérales III proposent un pilotage maîtrisé, ancré dans le dialogue international et avec des critères mesurables.
Par ces négociations, le Conseil fédéral adresse un signal clair. L’exécutif prend au sérieux les préoccupations de la population en matière d’immigration - tout en préservant le cadre juridique et économique nécessaire à la prospérité suisse. Loin d’imposer une ouverture aveugle, les bilatérales III posent des garde-fous, activables lorsque cela s’impose. Ni utopie fédéraliste, ni panique démographique: un tableau de bord plutôt qu’une pancarte Stop.
Cette position trouve un écho concret dans notre quotidien. 
La main-d’œuvre étrangère s’est non seulement intégrée, mais elle est devenue indispensable au bon fonctionnement de notre économie. Genève en témoigne chaque jour dans des secteurs aussi vitaux que la santé, le commerce ou l’éducation.
À travers cette clause de sauvegarde rénovée, la Suisse ne cède rien sur sa souveraineté. 
Elle s’ancre au contraire dans une vision de coopération ajustable, où la régulation se construit sur l’écoute, la responsabilité et la réciprocité. C’est cette approche nuancée, pragmatique et ancrée dans l’histoire des relations bilatérales, qui doit aujourd’hui être défendue face aux simplismes.