#Fongit A la tête de la fondation genevoise pour l’innovation technologique, Antonio Gambardella évoque les atouts qui facilitent le développement des start-up technologiques.
La Suisse caracole en tête de tous les classements pour ses capacités d’innovation. Pourquoi?
Chaque pays a sa propre identité concernant la réussite dans ce domaine. En Suisse, dans le cadre de start-up, l’innovation engendre surtout des entreprises deeptechs, dont la particularité est leur capacité à créer une rupture par la découverte scientifique ou en ingénierie. Je citerais quatre paramètres clé qui déterminent leur succès. Premièrement, elles sont motivées par la propriété intellectuelle, deuxièmement, elles fournissent des produits ou des services de niche, c’est-à-dire répondant à un besoin spécifique. Troisièmement, elles ont une vocation internationale — notamment du fait de la petitesse du marché intérieur — et, quatrièmement, qualité, elles ont une vocation B to B.
En quoi les deeptechs ont-elles des besoins différents des autres entreprises technologiques traditionnelles?
Du fait des qualités que je viens de citer, les jeunes pousses deeptechs ont besoin de temps pour arriver à maturité, parfois jusqu’à dix ou quinze ans. Un des aspects importants réside dans le fait que les fondateurs sont souvent des chercheurs ayant besoin d’infrastructures universitaires pour se développer. Or, en Suisse, il existe de nombreux instruments permettant d’obtenir du financement à un stade très précoce, comme les bourses ou autres donations dédiées à des projets prometteurs. L’avantage est qu’il est possible d’attirer des fonds de financement non dilutif, c’est-à-dire sans avoir besoin de proposer des actions en échange de ce capital.
Pourquoi est-il particulièrement intéressant d’intervenir si tôt?
Pour pouvoir soutenir un projet avant même qu’il soit incorporé dans une entité quelconque, avant même la création formelle de l’entreprise. Ensuite, quand celle-ci naît, elle a déjà une grande valeur – immatérielle – qui participe à son attractivité.
Que fait la Fongit dans ce cadre?
La question d’une progression fluide, par étapes, est fondamentale pour la réussite de tous projets partant de zéro sans argent. La Fongit assure le lien entre les universités et les entreprises de manière la plus souple possible. En les déchargeant ainsi, nous permettons aux chercheurs de se concentrer sur leur core business. Il faut savoir que les investisseurs pour le capital d’amorçage ne sont pas les mêmes que ceux intervenant par la suite, notamment parce que les risques sont spécifiques à chaque phase du développement, qui comporte ses risques spécifiques. Les montants ne sont pas non plus dans les mêmes proportions. Par exemple, une start-up naissante peut avancer avec une centaine de milliers de francs, tandis que pour monter en puissance, surtout dans les deeptechs, il faut compter en dizaines de millions de francs.
Quel genre de start-up soutenez-vous?
Un grand nombre d’entre elles émanent des écoles polytechniques fédérales, de l’Université de Genève ou de Lausanne, mais aussi du CERN, même si cela n’apparaît pas directement dans la liste de nos bénéficiaires. Sachant qu’il s’agit d’une organisation internationale, elle abrite moins de spin-off à proprement parler. Toutefois, de très nombreux projets émanent de créateurs d’entreprises ayant forgé leurs compétences au CERN répondent aux critères qui nous semblent intéressants et prometteurs.
Qu’est-ce que le Fongit Innovation Fund?
Il permet d’aider les start-up à accélérer leurs processus d’innovation au sein même des universités et autres écoles. Nous nous sommes inspirés de la fondation pour l’innovation technologique (FIT), qui a été à l’origine des grandes réussites dans le canton de Vaud, en proposant une approche assez similaire.
Pensez-vous que la sortie de l’accord cadre avec l’UE pénalise la réussite des sociétés innovantes suisses?
Sur un plan financier, je ne pense pas, car Innosuisse fait désormais mieux que compenser les fonds perdus, qui émanaient auparavant de l’Union européenne. Toutefois, il se présente un problème stratégique, car la Commission européenne n’intervient plus avec ses recommandations, qui permettaient de mieux positionner les sociétés sur le marché international. L’isolation est un problème.
Les nouveaux entrepreneurs ne risquent-ils pas de brider leur indépendance, alléchés par les promesses d’investisseurs opportunistes?
En théorie, cela pourrait arriver, mais je vois plutôt le problème inverse, à savoir des entrepreneurs un peu trop gourmands, qui voudraient croire à des histoires miraculeuses. Or, l’important, c’est d’atteindre un équilibre pour accompagner une croissance harmonieuse. Les principes de l’offre et de la demande restent plus que jamais valables pour ne pas être déconnectés de la réalité.
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