En septembre prochain, les Genevois se prononceront sur deux lois destinées à corseter les dépenses publiques. Le débat ne tombe pas du ciel: en dix ans, le canton a recruté près de 20% de fonctionnaires supplémentaires, une croissance deux fois plus rapide que celle de la population, qui a crû de quelque 10%. Aujourd’hui, Genève affiche des dépenses publiques par habitant parmi les plus élevées de Suisse, en particulier dans les domaines du capital humain et de la sécurité sociale.
Une récente étude de BAK Economics, commandée par la FER Genève, vient confirmer ce ressenti. Elle met en lumière un malaise grandissant du côté des entreprises du tertiaire. Ces derniers temps, plusieurs de ses membres l’ont interpellée pour dénoncer une forme de concurrence déloyale. Celle-ci prend la forme suivante: après avoir formé des collaborateurs à grands frais, ils les voient partir pour l’État, attirés par des salaires et des conditions plus avantageuses.
Il faut bien l’admettre, dans ce jeu, les PME, surtout, tiennent le mauvais rôle. Former est une mission aussi essentielle qu’onéreuse, surtout en Suisse, dont l’économie se distingue par sa haute valeur ajoutée. Le capital humain est ce qui en assure le succès. Pourtant, une fois ces compétences acquises, celles-ci profitent surtout au secteur public. Les employeurs privés continuent ainsi à offrir sur un plateau la part du roi, sans toujours récolter les fruits de leur investissement.
Ce paradoxe doit nous faire réfléchir. Les entreprises, prenant la part la plus active à la croissance spectaculaire du canton, alimentent les recettes fiscales et sociales. Or, le secteur public en vient à affaiblir ceux-là mêmes qui le nourrissent. Le parallèle avec le sport reste éclairant: un entraîneur peut recruter les meilleures pépites en ouvrant son porte-monnaie. Mais si les finances du club sont garnies grâce aux efforts de ses concurrents, la compétition finit par créer un sentiment d’injustice susceptible de se retourner aussi contre lui. Personne ne conteste la légitimité d’un service public efficace. Toutefois, la prospérité genevoise repose sur des bases plus fragiles qu’on le croit. L’environnement international chahuté rappelle combien la croissance peut s’avérer aléatoire. La prudence commande donc de ménager l’équité entre les forces en présence.
L’État et les entreprises ne devraient pas être placés en opposition frontale. Ils forment deux piliers complémentaires. Le premier assure la stabilité sociale, le second crée les richesses qui la rendent possible. Préserver cet équilibre, reconnaître le rôle central des employeurs privés dans la formation et l’innovation, voilà sans doute la meilleure garantie de loyauté et de pérennité pour l’ensemble des acteurs publics et privés.
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