#Transports Meilleur pour l’environnement, parfois moins cher que la route, mais plus contraignant, le fret ferroviaire stagne. Le Conseil fédéral veut le soutenir.
Le spécialiste en matériaux de construction Jérome, à Vernier, reçoit environ un wagon par jour de ses fournisseurs. «Nous travaillons avec des marchandises volumineuses, de faible valeur», explique Frédéric Plojoux, l’un des administrateurs, également président de la Fédération genevoise des fournisseurs de la construction. «Chez nous, on compte en mètres cubes et en tonnes.»
Ces caractéristiques conviennent parfaitement au fret ferroviaire, un mode de transport qui présente plusieurs avantages. Il se rit des bouchons. Les trains de marchandises peuvent circuler la nuit, contrairement aux camions, et les capacités du réseau sont loin d’être épuisées. Il convient aux gros volumes: un seul wagon peut transporter des dizaines de tonnes et un train jusqu’à quelques milliers. «Nous pouvons décharger les wagons à notre rythme pendant la matinée, alors que les poids lourds sont toujours sous pression du temps», ajoute Frédéric Plojoux.
Dans certains cas, le rail peut être meilleur marché que la route. «Pour acheminer un wagon complet depuis Zurich, nous payons à peu près l’équivalent du coût de la redevance poids lourds pour un trajet identique par la route», remarque Andrea Genecand, directeur de l’entreprise de transports Balestrafic et vice-président de l’Association suisse des transports routiers section Genève.
Le fret ferroviaire engendre beaucoup moins d’émissions nocives et requiert moins d’énergie et d’espace au sol. Cela pousse certains clients à le privilégier, notamment des collectivités publiques et des multinationales.
Rentabilité en question
Pourtant, la part du fret ferroviaire stagne depuis plusieurs décennies. Il est beaucoup moins flexible que le transport routier et peut être plus cher, selon les cas. Le prix augmente sensiblement si le point de départ ou de destination n’est pas relié au rail.
La constitution et le démantèlement des trains nécessite des opérations longues et gourmandes en main-d’œuvre. Les manœuvres d’attelage sont encore effectuées à la main. La gestion des informations est laborieuse: «Jusqu’à trois heures sont nécessaires pour collecter toutes les informations pertinentes pour l’exploitation et qu’un train de marchandises soit sécurisé et prêt à partir», note le Conseil fédéral.
Tous ces facteurs pèsent sur sa rentabilité. «Le trafic par wagons complets a généré un déficit de coûts d’environ quatre-vingts millions de francs en 2023, car le prix du marché est insuffisant pour couvrir les coûts de production», affirme Sabine Baumgartner, porte- parole des CFF, plus gros opérateur suisse à travers CFF Cargo. Les difficultés financières l’ont conduit à réduire les points de chargement à plusieurs reprises, ce qui a diminué l’attractivité de l’offre.
«De plus, les retards de CFF Cargo ont augmenté depuis un ou deux ans», remarque Nils Planzer, président et CEO de Planzer, l’une des trois entreprises de transport proposant le système Cargo Domicile (lire ci-dessous). «Ce n’est pas acceptable.»
La part du fret ferroviaire varie beaucoup selon le type de trafic. Il domine le transport de marchandises à travers les Alpes – trois quarts des passages se font par ce biais et les réserves de capacité sont encore substantielles. Elle est aussi élevée pour certains matériaux. «Environ 40% de nos expéditions de ciment en Suisse se font par train», déclare Arthur Got, Communications and Public Affairs Manager du cimentier Holcim. A Genève, il assure la moitié des transports de matériaux de construction de et vers les autres cantons.
Globalement, à l’interne et à l’import/export, il ne représente cependant qu’environ un quart du transport de marchandises. La situation est inverse en Autriche, où le rail assure trois quarts du fret interne et un quart du transit nord-sud. Le Conseil fédéral veut donc renforcer la part du rail à l’interne et à l’import-export. Il a transmis au parlement un projet de révision de la loi sur le transport de marchandises, en début d’année (lire ci-dessous).
CFF, pour sa part, se prépare à une croissance de 60% du fret ferroviaire d’ici à 2060. L’entreprise veut notamment créer cinq à huit city hubs – des terminaux de trafic combiné dotés d’espaces de stockage. Leur localisation est en cours de discussion.
En autorisant les services tiers, vous acceptez le dépôt et la lecture de cookies et l'utilisation de technologies de suivi nécessaires à leur bon fonctionnement. Voir notre politique de confidentialité.