Coupes budgétaires: la formation continue est sur la sellette

Céline Weber, conseillère nationale vaudoise.
Céline Weber, conseillère nationale vaudoise. Photo SK/ER
Steven Kakon
Publié mercredi 03 décembre 2025
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#Politique La formation continue pourrait bientôt perdre tout soutien financier fédéral. La conseillère nationale Céline Weber tire la sonnette d’alarme.

Dans le cadre de son programme d’allégement budgétaire 2027, la Confédération prévoit des coupes majeures dans la formation continue. Les fonds fédéraux destinés à la promotion des compétences de base des adultes, ainsi que le soutien aux prestations des organisations de formation continue, pourraient disparaître.
La bataille du budget se jouera au parlement lors de la session de décembre. La perspective inquiète Céline Weber, conseillère nationale, vice-présidente des Vert’libéraux et présidente de la Conférence romande pour la formation continue. Interview.

La formation représente 9,4% des dépenses totales de la Confédération. Vous dites qu’à terme, on dépensera plus pour l’armée. Cela vous inquiète-t-il?
Ce n’est pas l’augmentation du budget de l’armée qui m’inquiète en soi. Ce budget avait été réduit ces dernières années et, dans le contexte géopolitique actuel, notamment avec les cyberattaques, il est compréhensible qu’on le revoie à la hausse. Ce qui me dérange, c’est que cette hausse se fait sans évaluation précise des besoins et au détriment d’autres postes essentiels, comme la formation continue. Le Conseil fédéral prévoit même de supprimer entièrement le financement de la formation continue, alors qu’il ne représente «que» vingt millions par an, une goutte d’eau comparée au budget total de la Confédération.

Depuis 2025, les organismes actifs dans la formation continue doivent financer les projets à hauteur de 60% minimum. Que pensez-vous de cette réforme?
Au début, la Confédération finançait jusqu’à 80% ou 90% des projets subventionnés selon la loi sur la formation continue, en fonction du potentiel économique. Mais selon la loi sur les subventions, ce taux ne devrait théoriquement pas dépasser 40%, sauf pour des projets phare. Le Contrôle fédéral des finances a relevé à juste titre que la formation continue bénéficiait d’un taux de subventionnement supérieur à celui d’autres domaines. Le Secrétariat d'Etat à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI) a donc dû revoir sa copie. Il était évident que ce modèle n’était pas tenable à long terme.

Quelles sont les conséquences concrètes sur le terrain de cet amenuisement des ressources financières?
Le problème est que le changement a été brutal. Les acteurs de la formation continue ont eu très peu de temps pour s’adapter à une réduction aussi drastique du financement. Mais nous trouverons une solution. Ce qui est en revanche très préoccupant, c’est que le Conseil fédéral envisage désormais de supprimer totalement ce soutien. C’est une loi qui a mis du temps à être mise en œuvre, et les fonds sont utilisés efficacement. Couper vingt millions de francs par an, soit la totalité, est aberrant.

Le SEFRI parle de responsabilité individuelle et de logique de marché. Partagez-vous cette philosophie?
Globalement, oui. La loi sur la formation continue insiste sur l’apprentissage tout au long de la vie, ce qui implique une responsabilité individuelle. Mais celle-ci doit aussi être partagée par les employeurs. Là où elle atteint ses limites, c’est pour les compétences de base. En Suisse, une part significative de la population a des difficultés en lecture et en calcul. Ces personnes ne peuvent pas s’informer ni accéder facilement à la formation.

C’est donc à l’Etat d’aider ces personnes?
Au sein de la Conférence romande de la formation continue, nous réfléchissons à comment identifier ces personnes et financer des formations de base. L’objectif est de permettre à ces personnes de contribuer au marché du travail. C’est un enjeu de société.

Comment garantir l’égalité de l’accès à la formation alors que les aides fédérales se raréfient? Les cantons peuvent-ils compenser? Les cantons ne pourront probablement pas tout compenser. Selon l’ampleur des coupes, il faudra se montrer créatif et coordonner les efforts.

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