#Innokick Une table ronde récemment organisée par le master HES-SO Innokick a permis de souligner les liens entre la finance durable et les possibilités d’innovation.
Derrière la discussion technique et financière se cachent des enjeux politiques incontournables. Voilà une des conclusions qui ressort de la table ronde organisée fin avril à Renens par la direction du master Innokick de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO). Le thème et le titre de cette table ronde? «Finance durable, vecteur d’innovation.» «Le choix de ce sujet pour notre événement montre comment l’innovation, spécialité du master Innokick, est présente dans tous les domaines, y compris dans la finance, et dans la finance durable en particulier», souligne Sébastien Mettraux, responsable de ce master. La finance durable et l'innovation sont étroitement liées. Les trois spécialistes invités à la manifestation de fin avril ont admis ce point, en développant toutefois, chacun et chacune, certaines nuances dans leurs propos.
Ainsi, Jean-Pierre Danthine, professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et ancien vice-président de la Banque nationale suisse, Nicole Bardet, membre de la direction générale à la Banque Alternative Suisse et Antoine Mach, cofondateur de Covalence SA et codirecteur du CAS Sustainable Finance à la Haute école de gestion de Genève, ont donné aux participants une vision sinon exhaustive, du moins très précise de la situation. D’abord, pour Jean-Pierre Danthine, la finance durable, en prenant en compte les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans ses stratégies d’investissements, possède la volonté de changer «l’économie réelle», d’influencer les choix des managers et des entreprises, et, partant, de favoriser des innovations dans les secteurs à qui elle apporte son soutien. Certains fonds liés à la finance durable vont ainsi favoriser les cleantechs (technologies propres) ou de nouveaux types de mobilité. «Il s’agit de chercher des investissements rentables, mais qui, en plus, changent le monde et nos modèles de fonctionnement.»
Les critères ESG les plus stricts
Des acteurs bancaires comme la Banque Alternative Suisse offrent une vision poussée de cette dynamique. Voilà ce qu’explique Nicole Bardet: «Notre institution est une pionnière: elle existe depuis 1990, une époque où les thèmes mis en avant par la finance durable n’étaient pas centraux dans le débat public. Notre banque offre à ses quarantetrois mille clients la possibilité d’investissements durables qui répondent aux critères ESG les plus stricts. Ainsi, nous privilégions le soutien à des projets et à des entreprises sociales et écologiques et nous n’investissons pas dans certains secteurs ou certaines entreprises. De façon générale, nous intégrons de manière équilibrée les facteurs écologiques, socioéthiques et financiers dans la décision de placement».
Au fil de la discussion entre Jean-Pierre Danthine, Nicole Bardet et Antoine Mach, on comprend aussi que la finance durable est un facteur d'innovation – technique ou sociale – non seulement vis-à-vis de différents domaines dans lesquels elle investit et favorise des progrès majeurs (construction, technologies, recyclage, industries, énergies renouvelables, etc.), mais encore «à l'interne», c'est-à-dire en encourageant des changements importants dans la pratique même des métiers financiers. Dans cette perspective, Antoine Mach note que la finance durable a permis plusieurs avancées: plus de transparence dans les pratiques bancaires, plus d'écoute des clients et des investisseurs, plus d'informations données à ces derniers, etc.
Une certaine révolution intellectuelle
Pour Antoine Mach, «la finance durable a permis une certaine révolution intellectuelle: les spécialistes bancaires ont désormais davantage le réflexe de montrer à leur clientèle non seulement les rendements et les risques des différents produits financiers, mais encore l’alignement entre ces risques et ces rendements et certaines valeurs défendues en lien avec les critères ESG. Les banques consultent désormais plus systématiquement la volonté de placements de leurs clientes et de leurs clients, en les questionnant notamment sur les valeurs et les objectifs qu’ils souhaitent promouvoir à travers leurs investissements.» La question de l’écoblanchiment n’a pas été absente des débats entre les trois experts invités à la table ronde et tous ont admis la possibilité de ce phénomène et la nécessité de rassurer le public et de lui donner les moyens de mesurer la sincérité d’un acteur économique qui se présente comme respectueux des critères ESG. Les prochains défis de la finance durable en tant que vecteur d’innovation? Renforcer la formation du grand public aux questions financières et de durabilité, mais aussi la formation des professionnels qui souhaitent valider leurs compétences en finance durable; montrer toujours davantage les réussites de la finance durable et ses réels bénéfices; encore mieux expliquer aux clients les convergences, mais aussi les arbitrages qui peuvent être faits entre les considérations de risque, de rendement, et de durabilité; soutenir toujours plus efficacement des projets économiques innovants qui débutent et qui se donnent pour ambition de protéger l’environnement, de favoriser une meilleure forme de justice sociale ou de bonnes pratiques en matière de gouvernance.
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