Le parcours d’un lot de matières premières est souvent difficile à retracer.
Pierre Cormon
Publié mardi 18 mars 2025
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#Traçabilité
La start-up genevoise Verto Commodities retrace le parcours des lots de matières premières, de l’extraction ou récolte jusqu’à l’acquéreur final, dans un registre distribué.
Certaines entreprises vendent des vélos, du ciment ou des soins médicaux. La start-up genevoise Verto Commodities, elle, vend quelque chose de beaucoup plus abstrait: de la traçabilité, et plus particulièrement pour des matières premières hautement standardisées (cacao, café, soja, pierres précieuses, etc.). Elle s’appuie pour cela sur la technologie des registres distribués.
La demande de traçabilité est en hausse. Les consommateurs, les entreprises, les investisseurs et les autorités se soucient de plus en plus de savoir d’où proviennent les produits ou les matières premières qui ont permis de les fabriquer. L’Union européenne, notamment, veut bannir de son territoire ceux qui sont issus de parcelles déforestées après 2020.
Chaîne complexe
L’exigence n’est pas facile à mettre en œuvre. Les produits de grande consommation, comme le cacao, le soja ou le café, sont souvent commercialisés par une chaîne complexe. Le produit peut passer entre de nombreuses mains, les lots peuvent être mélangés, etc.
Le milieu s’intéresse donc beaucoup à la technologie des registres distribués (comme la blockchain). Elle permet de créer des registres infalsifiables, dans lesquels on peut retracer le parcours d’un lot. «Les grandes entreprises sont réticentes à mettre les informations liées à leurs transactions sur la place publique», remarque Baptiste Quidet, cofondateur de Verto Commodities, qui a travaillé pour de grandes entreprises de négoce à Genève et Dubai. «Elles utilisent souvent des blockchains privées, qui ne sont pas librement accessibles.»
Depuis la parcelle
Il y a donc de l’espace pour un système plus simple et plus transparent, permettant de suivre précisément le parcours d’un lot, de la parcelle jusqu’à l’acheteur final. C’est ce que propose Verto Commodities, avec un registre distribué fonctionnant avec la technologie Hedera.
Le registre peut être consulté librement sur le site de l’entreprise, par les acteurs de la chaîne, les autorités, les organisations non gouvernementales, les consommateurs, etc. Il suffit d’indiquer le numéro du lot ou de scanner le QR Code qui y correspond. On peut voir que le lot numéro 14, du cacao, a été récolté dans le deuxième semestre 2022 dans la province équatorienne El Oro. Chaque étape est répertoriée et datée, comme la fermentation, le séchage, le transport vers Puerto Bolivar, Anvers, Bâle, puis Molondin. Le lot en question a été acquis par l’entreprise Ecuacao pour sa production de chocolat.
Réputation
«Les données appartiennent à celui à qui elles se rapportent: le producteur, l’acheteur, etc.», explique Baptise Quidet. «Une fois entrées dans le registre, elles ne peuvent plus être modifiées, mais chacun peut décider de les laisser sous une forme anonymisée ou d’indiquer son identité afin de bâtir sa réputation.»
La traçabilité ne garantit pas encore qu’une parcelle n’ait pas été déforestée. Verto Commodities propose donc une autre prestation: la rédaction de rapports examinant l’évolution d’une parcelle à l’aide d’images satellites prises avant et après 2020. «Cela permet de se conformer à la réglementation de l’Union européenne», remarque Baptiste Quidet.
La start-up veut y ajouter un calculateur d’empreinte carbone et des outils d’analyse. Des discussions sont en cours avec une grande entreprise de certification qui s’intéresse à la solution.
Place de marché
Verto Commodities propose aussi une bourse mettant directement en relation acheteurs et vendeurs de produits tels que du cacao, des amandes, du safran ou de l’huile d’olive. A terme, l’entreprise aimerait le présenter sous forme de carte interactive, permettant de connaître les offres de produits, région par région. C’est encore de la musique d’avenir: Verto Commodities est encore en phase de démarrage (elle a fêté récemment son deuxième anniversaire). Elle compte pourtant déjà une poignée de clients, notamment en Equateur, au Niger et en Suisse. Comme un cacaoyer, une jeune pousse technologique a besoin de quelques années pour arriver à maturité.
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