Du bruit dans les étages

Entre l'espace aérien et le cosmos, un étage n'est pas réglementé.
Entre l'espace aérien et le cosmos, un étage n'est pas réglementé.
Maurice Satineau
Publié mercredi 25 octobre 2023
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#Espace aérien Que se passe-t-il dans la zone située entre vingt et cent kilomètres d’altitude? Les avions n’y vont que rarement, les fusées spatiales n’y font que passer. Devant les convoitises suscitées par cet espace, une réglementation internationale est à l’étude.

D’un côté, il y a l’espace aérien classique, auquel se réfère la convention de Chicago de 1944. De l’autre, c’est le début du cosmos, objet du Traité de l’espace extra-atmosphérique de 1967. Entre les deux, les missiles militaires hypersoniques, les vols commerciaux pour touristes fortunés ou les nouvelles générations de ballons d’observation se multiplient en dehors de toute véritable régulation. L’Organisation de l’aviation civile internationale et l’Union européenne travaillent de concert sur de nouveaux textes. L’exercice n’est pas facile, car les documents existants n’ont jamais vraiment défini les limites dans le ciel, hormis le fait qu’un avion puisse s’appuyer sur l’air. Si l’espace aérien est placé sous la souveraineté exclusive des Etats, les activités dans le cosmos sont en principe totalement libres.

En construction

En 2023, la technologie permet de se déployer dans la zone intermédiaire. Le groupe Thalès prépare pour 2025 une sorte de dirigeable qui pourra y faire de l’observation avec une autonomie d’une année. Il offrira une couverture très détaillée pour une surface d’environ mille kilomètres au sol. Cet outil améliorera les télécommunications ou la surveillance, avec une résolution plus fine que celle des satellites placés en orbite bien plus haut. De son côté, l’entreprise Dassault croit aux avions hypersoniques civils et militaires fonctionnant à l’hydrogène. Airbus peaufine sa plateforme Zephyr, capable de repérer un objet de dix-huit centimètres de longueur dans un kilomètre carré.

L’Agence spatiale européenne a commencé à étudier les aspects techniques de la zone nouvelle. C’est aussi le cas chez Eurocontrol: «On parle de bulle mobile adaptée aux caractéristiques des avions ou des systèmes. On en parle également pour les opérations en haute altitude, parce qu’il faut limiter le plus possible les blocs d’espace réservés. Mais pour que cela fonctionne, il faut de l’interconnectivité», explique Eric Billard, chef de l’unité Architecture et Recherche. Pour sa part, l’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne examine les questions réglementaires et juridiques.

Permis ou non

Entre les puissances spatiales affirmées, les pays ayant simplement une capacité d’aller dans la nouvelle couche désignée, et ceux n’étant pas équipés technologiquement, mais ayant de gros besoins d’observations et de télécommunications, le débat s’annonce rude. Devant un missile survolant sans prévenir un territoire depuis l’espace classique, il n’y a pas grand-chose à dire, sinon peut-être protester officiellement pour la forme. Avec un objet s’aventurant beaucoup plus bas à très grande vitesse ou quasiment stationnaire, la trajectoire devient plus politique. La finalité du vol et la catégorie d’engins concernée seront prises en compte dans un éventuel régime d’autorisation. Il y a urgence, car la décennie 2030 verra se concrétiser ces nouvelles possibilités.

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