L’éco-conception: aussi pour les graphistes!

Lucile Quero.
Lucile Quero.
Grégory Tesnier
Publié jeudi 14 décembre 2023
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#Eco-conception La notion d’éco-conception n’est pas réservée aux designers et aux ingénieurs

Les graphistes aussi sont invités à réinventer leur profession en fonction des enjeux actuels de durabilité. Forte de cette conviction, Lucile Quero, graphiste et directrice artistique, experte en image de marque d’entreprises responsables, vient de publier un livre-guide qui veut «lancer un défi aux concepteurs».

«La planète rencontre des difficultés, elle subit de nombreuses crises sociétales, environnementales et sanitaires. Les métiers de la création doivent donc se tourner vers un graphisme plus responsable. L’enjeu est de taille: il faut adapter les métiers de designer graphique et de directeur artistique aux impératifs environnementaux et à l’urgence climatique. Un design graphique uniquement pensé pour faire du beau ou pour vendre n’est plus d’actualité. Les graphistes ne doivent plus simplement créer, mais aussi contribuer, à travers leurs créations, à limiter les désastres sur notre planète.» L’ouvrage L’éco-conception pour les graphistes couvre un large spectre d’actions possibles. Les exemples et conseils cités concernent la consommation des ressources naturelles (énergie, papier, colle, emballages), l’utilisation de produits nocifs ou dangereux (encres, solvants), la production de déchets, les pollutions diverses, les transports, le message, la transparence du processus de création ou le respect du client et de l’utilisateur final.

Des obstacles se dressent pourtant sur le chemin des graphistes désireux de changer leurs pratiques. Par exemple, que peuvent-ils faire lorsqu’ils proposent des solutions durables, mais que leurs clients restent fermés aux propositions? Ces derniers ont en effet tendance à être «plus préoccupés par l’esthétique que par les impacts environnementaux ou sociaux de leurs projets». Des clients peuvent aussi avoir une idée préconçue sur les matériaux et les fournisseurs durables. Ils pensent qu’ils seront plus coûteux que les fournisseurs traditionnels, ce qui n’est pas forcément le cas.

Que faire face aux objections des clients?

«Les clients ne veulent pas délibérément polluer la planète, mais ils privilégient le temps et l’argent plutôt que les impacts de leur demande.» Pour Lucile Quero, les graphistes doivent jouer un rôle de messagers. Ils doivent toujours avoir en tête et comme priorité l’explication des enjeux et la sensibilisation continue des mandants. «Ce n’est pas une tâche facile.»

Au lieu d’aborder la demande d’un client en se tournant simplement vers leurs ordinateurs, les graphistes et les concepteurs doivent penser au-delà du projet. «Plutôt que de concevoir un produit graphique qui se retrouvera probablement dans le bac de recyclage ou à la poubelle, peuvent-ils travailler pour créer moins de déchets? Peuvent-ils livrer le même message en concevant une création que le destinataire voudra conserver ou réutiliser?» Lucile Quero encourage les professionnels du graphisme à demeurer fidèles à leurs engagements pour la durabilité et à leurs valeurs et à résister face aux objections éventuelles des clients. «L’une des clés d’un graphisme durable est de rester cohérent et sûr de soi. Les hésitations donneraient au client l’impression qu’il n’y a pas de véritable engagement écologique. Plutôt que de réduire l’aspect durable et responsable du projet, collaborez avec le client pour repenser son approche. Par exemple, un nombre plus petit et plus précis de brochures peut-il être imprimé au lieu de payer un prix plus élevé et de garder les suppléments stockés dans un carton?» Lucile Quero prône finalement l’enthousiasme: «Plus vous êtes aligné sur ce que vous faites, plus vous serez passionné et plus le client sera susceptible de travailler avec vous. L’enthousiasme rend votre message beaucoup plus puissant, parce que l’énergie passe aussi par votre langage corporel. Les gens réagissent au dévouement émotionnel».

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