#Electricité La Suisse produit plus d’électricité qu’elle n’en consomme en été, et moins en hiver, où elle dépend des importations.
Ce déséquilibre, aujourd’hui de 7 TWh (grosso modo la production annuelle d’une centrale nucléaire), devrait s’accentuer avec l’avancée de la transition énergétique. La Suisse comptera de plus en plus de panneaux photovoltaïques, qui produisent surtout en été, et de pompes à chaleur, qui consomment surtout en hiver. Le déséquilibre pourrait donc monter à 10 TWh en 2050, selon la Confédération. «En été, le réseau ne pourra pas absorber toute l’électricité photovoltaïque», prévient Alexandre Closset, chef de projet partenaires industriels de la Coalition for Green Energy and Storage. «En hiver, il ne parviendra pas à acheminer toute l’électricité vers le consommateur. Nous avons fait des calculs pour une région qui veut convertir tous ses chauffages en pompes à chaleur et faire passer tout le parc automobile à la propulsion électrique. Pour que le réseau soit capable d’absorber toutes ces demandes supplémentaires, il faudrait multiplier sa capacité par dix-huit.»
Stockage
Pourrait-on stocker l’excédent de courant estival pour l’utiliser en hiver? C’est l’une des questions sur lesquelles se penche la Coalition for Green Energy and Storage, un groupe d’acteurs publics et privés réunis autour de l’EPFL de l’EPFZ, de l’ Institut Paul Scherer et du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche (EMPA). Oubliez tout de suite l’idée de stocker l’électricité dans des batteries du type de celles utilisées par les Tesla: il en faudrait septante millions pour y parvenir, pour un coût minimum de sept cent milliards de francs, a calculé la coalition. Le procédé entraînerait par ailleurs une énorme consommation de métaux, dont l’extraction peut provoquer de sérieux dommages environnementaux.
Le pompage-turbinage (qui consiste à utiliser l’électricité excédentaire pour remonter l’eau dans des barrages de montagne afin de la turbiner quand on en a besoin) pourrait-il faire l’affaire? Stocker la quantité d’eau nécessaire nécessiterait la construction de quatre barrages de la taille de la Grande Dixence – une option difficilement envisageable. «Transformer l’électricité en hydrogène vert et le stocker dans des tubes coûterait jusqu’à septante milliards de francs, l’utiliser pour produire du méthane et le stocker dans des cavernes cinq milliards de francs», poursuit Alexandre Closset.
Méthanol
La coalition étudie la possibilité d’utiliser l’électricité excédentaire pour produire de l’hydrogène vert, puis de transformer celui-ci en méthanol, le plus simple des alcools. Il a le bon goût d’être liquide, ce qui lui permet d’être stocké facilement. Le coût total du stockage de 10 TWh se situerait entre cinq cent millions à un milliard de francs – soit environ dix à vingt fois moins que le coût d’une centrale nucléaire de seconde génération. On peut ensuite facilement utiliser cette substance pour produire de l’électricité et de la chaleur. Une installation d’une puissance d’1 MW – l’équivalent de deux ou trois mâts d’éoliennes – devrait être construite dans les années à venir, afin de tester le concept. Le stockage de l’électricité sous forme d’hydrogène devait être fait à l’échelon local. «Un quartier produira en été le surplus d’électricité qu’il consommera en hiver, sans surcharger le réseau», résume Alexandre Closset. S’il produit trop d’hydrogène pour ses besoins, il pourra l’injecter dans le réseau de gaz, qui tolère une certaine proportion de cette substance. Des sites d’une certaine taille pourront aussi le transformer en méthanol, voire en méthane.
Un pessimiste regrettera qu’une partie substantielle de l’énergie soit perdue dans les opérations de transformation – environ 50%, si l’on valorise la chaleur qu’elles génèrent. Un optimiste répondra qu’il s’agit d’électricité excédentaire, qu’on ne pourrait pas utiliser autrement. On récupérera 50% d’une énergie qui serait perdue sans cela.
Quant au coût, il est encore difficile à évaluer, mais fait déjà l’objet de discussions.
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