Quotas dans les conseils d’administration européens

L’Union européenne augmente la proportion de femmes dans les postes de direction des entreprises cotées en bourse. La Suisse reste à la traîne.
L’Union européenne augmente la proportion de femmes dans les postes de direction des entreprises cotées en bourse. La Suisse reste à la traîne.
Barbara Speziali
Publié vendredi 16 décembre 2022
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#Quotas L’Union européenne a décidé de fixer un quota d'au minimum 40% de femmes dans les conseils d’administration des entreprises cotées en bourse.

Il aura fallu dix ans pour que la directive relative à la présence des femmes dans les conseils d’administration, baptisée Women on Boards, soit adoptée fin novembre par le Parlement européen, après un compromis signé en juin dernier avec les Etats membres. Toutes les précédentes tentatives avaient échoué face au refus allemand d’instaurer des mesures européennes contraignantes pour les grandes entreprises. Le vent a tourné en décembre 2021, avec l’arrivée du social- démocrate Olaf Scholz à la chancellerie. Les négociations ont pu reprendre sous la présidence française et aboutir à un accord préliminaire en juin.

D’ici à fin juin 2026, toutes les grandes entreprises cotées en bourse dans l’Union européenne (UE) devront prendre des mesures pour qu’au moins 40% des postes dans les conseils d’administration et 33% des postes de direction soient occupés par des femmes. Les petites et moyennes entreprises de moins de deux cent cinquante employés ne sont pas concernées.

Lors du débat, les députés ont insisté sur le fait que le mérite devait rester le critère clé des procédures de sélection, qui doivent être transparentes. Mais lorsque deux candidats à qualification équivalente briguent un poste, la priorité devra être donnée à la personne du genre sous-représenté.

Les entreprises cotées devront fournir une fois par année aux autorités compétentes des informations sur la représentation des hommes et des femmes au sein de leur conseil d’administration et, si les objectifs n’ont pas été atteints, sur la manière dont elles prévoient y parvenir.

Des sanctions sont prévues pour les entreprises récalcitrantes, notamment des amendes et l’annulation du recrutement des directeurs. «Après dix ans, depuis que la Commission européenne a proposé cette directive, il est grand temps que nous brisions ce plafond de verre», s’est félicitée Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne. «Il y a beaucoup de femmes qualifiées pour les postes de direction. Elles devraient pourvoir y accéder.»

Disparités selon les pays

La représentation des femmes à la direction des entreprises s’améliore, mais les progrès sont lents et il existe des différences notables entre les Etats membres de l’UE. Selon l’Institut européen pour l’égalité des genres, la proportion de femmes dans les conseils d’administration des plus grandes sociétés dans l’UE est passée de 11,9% en 2010 à 31,6% en 2022. Seule la France dépasse la barre des 40%, avec un taux de 46,3%. Elle est suivie de l’Italie (39,8%). En queue de peloton, on trouve la Hongrie, Chypre et l’Estonie, avec respectivement des taux de 10,5%, 9,8% et 8,3%. Quant au poste de président ou de PDG, moins d’une grande société sur dix est dirigée par une femme dans l’UE. La parité est loin d’être acquise. Il reste du pain sur la planche!

«Les quotas sont certes un instrument rudimentaire, mais là où il y a un manque de volonté, il faut une loi et cette loi est une réussite importante», s’est réjouie l’eurodéputée socialiste néerlandaise Lara Wolters, corapporteuse du texte. Et d’ajouter: «Toutes les données montrent que l’égalité des genres dans les sociétés ne s’obtient pas par pure chance».

De fait, la situation est meilleure dans les neuf pays qui ont déjà adopté des lois instaurant des quotas – la France, l’Italie, l’Allemagne, le Portugal, l’Espagne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Autriche et la Grèce. D’autres pays, comme les pays nordiques, ont mis en place des mesures non contraignantes. Parmi les pays à la traîne figurent les pays d’Europe centrale où rien n’existe encore pour corriger le déséquilibre.

Progrès en Suisse

En Suisse, on enregistre des progrès significatifs en ce qui concerne la présence de femmes aux postes dirigeants. Selon l’Union patronale suisse, la part des femmes dans les directions d’entreprises atteint en 2022 17% et, dans les conseils d’administration, elle s’élève à 26%.

Les valeurs de référence fixées par le Conseil fédéral en septembre 2020 pour les sociétés cotées en bourse, à savoir 20% de femmes pour la direction et 30% pour le conseil d’administration, devraient être obtenues dès 2024. Une évolution dont se félicite le syndicat, tout en rappelant que «les employeurs restent néanmoins persuadés qu’imposer des quotas légaux de femme n’est pas la bonne solution». 

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