La marque brésilienne qui redessine l’industrie chocolatière

Une image d'élégance.
Une image d'élégance. Entreprise romande
Pierre Cormon
Publié jeudi 28 décembre 2023
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#Brésil L’entreprise Dengo fondée en 2017 connaît une croissance fulgurante grâce à un modèle d’affaires et à une communication basés sur des valeurs environnementales et sociales.

Le chocolat de haut de gamme, un marché saturé? Pas pour Dengo. La marque brésilienne fondée en 2017 a connu une croissance très rapide grâce à un modèle d’affaires et une communication se démarquant clairement. Elle compte une trentaine de boutiques au Brésil et a ouvert son premier magasin européen en avril, à Paris. A l’origine de Dengo se trouve l’industriel Guilherme Leal, cofondateur du groupe cosmétique Natura & Co (qui possède notamment The Body Shop et Avon Products). Très engagé en matières environnementale et sociale, il a créé une organisation non gouvernementale aidant les petits producteurs de cacao du sud de l’Etat de Bahia à améliorer leur revenu en appliquant des méthodes respectueuses de l’environnement.

Luxe et morale

Jugeant qu’il fallait aller plus loin, il a fondé Dengo, en collaboration avec l’ancien directeur du marketing de Natura & Co. Leur vision: vendre du chocolat de haut de gamme, élaboré en favorisant l’environnement et la justice sociale, et le faire savoir haut et fort. Dengo se démarque dans le monde du commerce équitable, qui a peu l’habitude de viser le haut de gamme. Il se distingue également dans le monde du luxe. «Les marques de chocolat premium luttent toutes dans la même zone: elles veulent passer une image de sophistication et d’élégance», décrypte Andre Lona, spécialiste et conseiller en branding de São Paulo sur sa chaîne Youtube. «Dengo est aussi une marque pre- mium, mais ses responsables passent leur temps à parler de ce en quoi ils croient et de leurs valeurs.»

Achats directs

L’entreprise travaille directement avec les producteurs, qu’elle laisse libres de vendre du cacao à d’autres acheteurs. L’entreprise les forme gratuitement à produire du cacao de qualité, dans le respect de l’environnement. Ils appliquent un mélange de méthodes traditionnelles et de techniques développées par le Centre d’innovation du cacao et dans une ferme pilote, tous deux financés par Guilherme Leal.

Cet effort est récompensé par un prix d’achat supérieur de 92% au prix du marché, en moyenne. «Plus on paie cher, plus on est heureux!», affirme Estevan Sartorelli. Dengo a pour objectif de doubler le revenu des fermiers par rapport à celui dont ils disposaient avant la création de l’entreprise.

Usine vitrine

Le cacao est transformé dans une usine à São Paulo, qui fait office de vitrine de la marque. On y trouve un restaurant, une boutique, une exposition didactique et des machines qui permettent de fabriquer une plaque de chocolat avec les ingrédients de son choix et de l’emballer de manière personnalisée. Les produits de la marque ont un large recours à des produits typiquement brésiliens: fève de tonka, noix de cajou, tapioca, noix de macadamia. L’identité visuelle exalte également la brasiliannité, en mélangeant images de la nature et œuvres d’art contemporaines.

Engagements chiffrés

Dengo a publié un certain nombre d’engagements chiffrés pour 2030: augmenter le revenu et l’accès au crédit des fermiers, accroître le nombre d’exploitations dirigées par des femmes, augmenter la proportion de vente en vrac, diminuer la teneur en sucre des produits, éliminer totalement le plastique des emballage.

Quant aux vendeurs, «ils sont formés à ne pas vendre, mais à éduquer les clients à propos de la marque et des produits», remarque Andre Lona. Bref, tout est fait pour donner au client le sentiment qu’en flattant ses papilles, il contribue à améliorer le monde. Ce qui permet de justifier des prix se situant dans le haut de la fourchette.

L’image de Paris

C’est pour disposer de la meilleure vitrine possible que Dengo a choisi Paris pour sa première boutique hors du Brésil. «Le public y est exigeant et les marques qui y rencontrent le succès gagnent du crédit au niveau international», a expliqué Charles Znaty, président de Dengo Europe et ancien associé de la star de la pâtisserie Pierre Hermé. La marque réfléchit à s’étendre ensuite aux Etats-Unis, en Asie et au Moyen Orient.

Le chocolat vendu à Paris est transporté du Brésil par avion. Une entorse aux principes de l’entreprise? La marque justifie le procédé par la nécessité de maintenir les produits frais, sans conservateurs. Elle ajoute compenser son empreinte carbone par des actions en faveur de la forêt brésilienne. A terme, elle compte créer une usine en France.

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