Lourdes conséquences pour la Suisse et son économie

« Les effets économiques négatifs de la non-signature de l’accord-cadre sont difficiles à chiffrer, mais ils existent. »
« Les effets économiques négatifs de la non-signature de l’accord-cadre sont difficiles à chiffrer, mais ils existent. »
Gregory Tesnier
Publié vendredi 21 janvier 2022
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#Suisse-UE Les milieux économiques inquiets de la non-signature de l'accord-cadre avec l'Union européenne.

Le Conseil fédéral a décidé, le 26 mai 2021, de ne pas signer le projet d’accord cadre entre la Suisse et l’Union européenne (UE) et de rompre les négociations sur ce texte. Les milieux économiques s’inquiètent fortement de cette situation et souhaitent que ce dossier politique revienne au centre des priorités. Dans cette optique, le Groupement des entreprises multinationales (GEM) et la Fédération des entreprises romandes Genève (FER Genève), soutenus dans leur démarche par l’Union patronale suisse (UPS), ont récemment demandé un avis de droit spécifique à la professeure et rectrice de l’Université de Fribourg Astrid Epiney (lire son interview : web/er/w/-il-serait-souhaitable-que-le-conseil-federal-se-decide-a-avoir-une-ligne-de-conduite-precise-pour-guider-ses-futures-relations-avec-l-ue-).

L’analyse des «implications de l’échec des négociations d’un accord cadre entre la Suisse et l’Union européenne» présente un rapide historique des négociations entre les deux partenaires depuis l’accord de libre-échange de 1972, les raisons qui ont pu mener à l’impasse actuelle, un descriptif et une explication des «questions institutionnelles», devenues une demande centrale de l’UE depuis 2008, un aperçu des conséquences de la non-signature de l’accord cadre après la décision du 26 mai 2021 et les chemins qui s’ouvrent désormais devant la Suisse pour stabiliser ses futures relations juridiques, politiques et économiques avec l’UE.

En ce qui concerne ce dernier point, ces chemins semblent difficiles d’accès, encore mal balisés ou inexistants selon les six scénarios étudiés par l’avis de droit de la professeure Astrid Epiney: «Statu quo, adaptation autonome du droit suisse et dialogue politique», «Développement de l’accord de libre-échange de 1972», «Négociation d’un nouvel accord cadre», «Nouveaux accords sectoriels combinés avec des éléments d’un accord cadre («bilatérales III»)», «Adhésion à l’Espace économique européen» et «Adhésion à l’Union européenne».

Erosion inévitable de l'accès au marché de l'UE

Dans tous les cas, «la question de savoir si le résultat provisoire des négociations (à propos de l’accord cadre abandonné le 26 mai dernier) était à considérer comme équitable est (ou plutôt était) au fond une appréciation politique. Un élément de cette appréciation parmi d’autres était (ou aurait dû être) sans aucun doute aussi l’évaluation des risques d’un échec des négociations par rapport aux risques liés à la conclusion de l’accord», rappelle l’avis de droit.

Des risques après l’échec des négociations? «L’aspect le plus important est probablement l’érosion successive de l’accès au marché de l’UE tel qu’il est garanti actuellement, résultant d’une part de la non-adaptation des accords bilatéraux existants et d’autre part de décisions unilatérales de l’Union concernant l’adéquation ou l’équivalence de la législation suisse dans certains domaines». En effet, «il paraît trompeur d’insinuer que l’arrêt des négociations n’aurait pas réellement d’effets, puisque les accords existants entre la Suisse et l’Union continueraient bien sûr d’exister. En effet, au vu de la nécessité de leur développement ainsi que de la nécessité de nouvelles décisions et de nouveaux accords pour pérenniser l’accès au marché (et de le développer du moins ponctuellement), un statu quo ne peut justement pas être maintenu sans la volonté et l’accord des deux parties». Le texte rédigé par Astrid Epiney prévient: «Les effets économiques (de la non-signature de l’accord cadre après la décision du 26 mai 2021) sont, du moins en partie, difficiles à chiffrer; toutefois, il faut s’attendre à notre avis à des répercussions directes et indirectes considérables». Cette réalité, comme le soulignent le GEM et la FER Genève, «alarme les PME innovantes et les start-up qui bénéficiaient des financements liés aux programmes cadre de recherche de l’UE. Elle alarme les entreprises multinationales dont les activités basées en Suisse se trouvent en concurrence avec d’autres sites au sein même de leurs structures et confrontées à une instabilité juridique et un manque de perspective difficilement soutenables. Cette même réalité inquiète les organisations économiques qui se mobilisent pour s’assurer que le dossier européen soit au centre des préoccupations des acteurs politiques».

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