Opinions

Nos chères éco-contradictions

Flavia Giovannelli Journaliste Publié vendredi 10 juin 2022

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Préoccupation légitime et collective, l’écologie est souvent à géométrie variable.

La toute récente édition des Assises européennes de la transition énergétique a ainsi connu un joli succès de participation à Genève. Mais les lignes ont-elles vraiment bougé, comme le souhaitent les organisateurs?

Ces derniers temps, en tout cas, nous avons souvent constaté que rien n’a vraiment changé, par exemple en matière de tourisme d’achat, toujours aussi bien ancré dans les mœurs malgré les injonctions à consommer local. Tout comme le réflexe de prendre sa voiture ou même l’avion pour s’aérer quelques jours. Même si les rapports scientifiques ou les photos des Alpes1 montrent sans ambiguïté l’impact du réchauffement climatique, les comportements au quotidien font de la résistance.

Ce décalage

s’explique en partie par l’approche parfois incohérente ou malhabile des pouvoirs publics. Les discours et les actes manquent souvent de réalisme et de réflexion systémique pour tester la viabilité. Il arrive à certains d’apparaître comme des donneurs de leçons, alors qu’ils ne suivent pas eux-mêmes leurs propres préceptes ou sont pris en flagrant délit de méconnaissance des dossiers.

Il faudrait se rappeler

que tout modèle ou toute décision possède sa part d’ombre. Par exemple, il est assez dérangeant que la Ville de Genève soutienne la campagne Faire face d’Extinction Rebellion, soit celle d’un mouvement connu pour ses actes de désobéissance civile. Dans le cas précis, ces affiches dépeignent une Genève cataclysmique et appuient sur le réflexe de peur. Une approche peu subtile et financée par les deniers du contribuable, qui n’a pas eu son mot à dire. Il y a donc des risques pour que cette méthode braque plus d’esprits qu’elle n’encourage à agir.

Or, si nous voulons

atteindre nos objectifs environnementaux, il faut savoir faire preuve d’intégrité sociétale et d’anticipation. Tout le monde gagnerait à s’ouvrir à des débats qui admettent la contradiction, sans entêtement ni dirigisme. Cela pourrait donner plus de crédit à une démarche écologique qui, sans cela, restera cantonnée au rang des complaintes larmoyantes et fatalistes. Ou qui sombre dans un autre travers, à savoir des actions coups-de-poing, par essence peu productives.

1Des chercheurs suisses viennent de publier cette étude dans la revue Science, basée sur des photos en haute-résolution prises ces trente-huit dernières années.