Nouvelle impulsion pour la stratégie climatique

La loi sur le climat soumise au peuple suisse le 18 juin offre plus de flexibilité que l’initiative des glaciers, dont elle est le contre-projet.
La loi sur le climat soumise au peuple suisse le 18 juin offre plus de flexibilité que l’initiative des glaciers, dont elle est le contre-projet.
Flavia Giovannelli
Publié vendredi 26 mai 2023
Lien copié

#Climat Le contre-projet à l’initiative sur les glaciers présente des avantages pour accompagner les entreprises dans leur transition énergétique.

Parmi les objets soumis au vote populaire le 18 juin prochain figure la loi climat1. Le texte élaboré par le parlement prévoit d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, sans passer par de nouvelles taxes ou interdictions, misant plutôt sur des programmes d’encouragement et soutenant l’innovation. A la fois simple et ambitieuse, cette loi reprend les principaux points de l’initiative dite des glaciers (lire ci-dessous), sans interdire toutefois explicitement le recours aux énergies fossiles. L’option choisie permet de procéder par étapes, grâce à des mesures et des instruments concrets, qui devront être définis plus précisément au fil du temps. Ainsi ficelé, le projet dispose d’un large soutien politique, de droite et de gauche, tout comme celui de très nombreuses associations. Certaines ont de forts intérêts en jeu, comme l’Union suisse des paysans, la Fédération suisse du tourisme ou la communauté des sports outdoor. Près de deux cents scientifiques spécialistes du climat apportent également leur soutien à cette loi. Dans le camp des opposants, on trouve principalement l’UDC, auteur du référendum ayant abouti, le peuple devant alors se prononcer.

Manne fédérale

Pour convaincre, la Confédération a mis sur la table des aides substantielles, qui s’élèvent à près de 3,2 milliards de francs. Deux milliards, soit deux cents millions par an pendant une décennie, seront débloqués pour le remplacement des chauffages polluants et l'assainissement énergétique des bâtiments. Cette manne devrait entraîner une réduction des coûts pour les propriétaires, ainsi qu’une baisse des charges pour les locataires. Une aide supplémentaire de 1,2 milliard sera versée jusqu’en 2030 aux entreprises qui auront recours à des technologies innovantes pour atteindre les objectifs de la loi, selon un cahier des charges à définir. Le Conseil fédéral précise que cette loi n’a rien d’un blanc-seing, puisque les mesures plus étendues sont toutes sujettes à référendum.

Selon une étude de la Haute école zurichoise des sciences appliquées, la valeur ajoutée qu’entraînerait un développement modéré des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique s’élèverait à 77 milliards de francs. Selon ce scénario, cinquante mille emplois supplémentaires seraient créés, dont plus des deux tiers dans des PME. La loi climat apporterait aussi une sécurité de planification aux entreprises en garantissant la demande.

1Loi sur le climat est l’abréviation du titre complet: Loi fédérale sur les objectifs en matière de protection du climat, sur l’innovation et sur le renforcement de la sécurité énergétique (LCI).


Les objectifs principaux de la loi

  • En 2050, les émissions nettes de gaz à effet de serre de la Suisse doivent être nulles. D’ici là, la politique climatique passera par différentes étapes.
  • S’il n’est pas possible de faire autrement, les compensations de CO2 à l’étranger et les émissions négatives peuvent être prises en compte dans la réalisation des objectifs.
  • D’ici à 2029, les entreprises ou les secteurs d’activité qui élaboreront des feuilles de route visant à atteindre l’objectif de zéro émission nette bénéficieront du soutien technique de la Confédération.
  • La Confédération encourage le remplacement des chauffages fossiles et des chauffages électriques à résistance par des systèmes de chauffage renouvelables et autres mesures d’efficacité dans les bâtiments à hauteur de 200 millions de francs par an sur dix ans.
  • Il sera possible de séquestrer le CO2 dans des puits de carbone, y compris à l’étranger. La Confédération et les cantons veillent à ce que de tels puits soient disponibles en quantité nécessaire.
  • La Confédération peut conclure avec le secteur financier des accords visant à donner à ce secteur une orientation compatible avec les enjeux climatiques.

Le sort des glaciers sur la sellette

Pour une majorité de scientifiques, la cure de minceur des glaciers s’est accélérée beaucoup plus rapidement que prévu ces dernières années. La Suisse, pays alpin, figure au premier rang des Etats très menacés, même si les conséquences de la fonte des glaces se font sentir sur l’ensemble de l’Europe, voire du monde. Daniel Farinotti, glaciologue à l'École polytechnique fédérale de Zurich et membre du comité directeur de Glamos (le portail des relevés glaciologiques suisse), estime que les glaciers suisses ont perdu la moitié de leur volume entre 1931 et 2016 et 12% entre 2016 et 2021. Des records de fonte ont même été enregistrés en 2022, avec une perte équivalente à trois kilomètres cubes de glace. Trois causes principales sont mises en avant: les faibles chutes de neige de l’hiver 2021-2022, le dépôt de grosses quantités de sable du désert du Sahara entre mars et mai 2022 (qui a réduit le pouvoir réfléchissant des surfaces) ainsi que la canicule extrêmement longue de l’été dernier.

insérer code pub ici