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Oncle Sam parie sur la Roumanie

Mirel Bran Publié vendredi 21 juin 2024

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Les alchimistes ne rêvaient pas d’or, mais de la pierre philosophale (lapis philosophorum, en latin), qui avait le pouvoir de transformer un métal ordinaire en or. Cette pierre miraculeuse était également réputée au Moyen Âge pour guérir les maladies, prolonger la vie et déclencher le processus d’illumination chez les mystiques. Un des éléments qui composaient cette pierre était le magnésium, dont l’étymologie remonte au grec ancien magnesia (roche magnétique).

Dans le monde contemporain, le magnésium a moins d’éclat. Il est un simple élément chimique qui occupe la douzième position dans le tableau de Mendeleïev. Il n’est plus réputé pour produire de l’or et des expériences mystiques, mais pour des qualités plus terre-à-terre. Le magnésium est dur, plus léger que l’aluminium, facile à usiner et abordable. Bref, c’est le métal de construction parfait. Le seul hic, c’est qu’il n’y a pas de production industrielle de magnésium dans l’Union européenne (UE) et qu’il doit être importé à 100% de Chine. La donne va changer, puisque le 12 avril, la Roumanie a accordé à la société Verde Magnesium l’autorisation d’ouvrir une mine près de la ville d’Oradea, dans le nord-ouest du pays. Ce projet industriel sera financé par un montant d’un milliard de dollars investi par le fonds américain Amerocap. Les États-Unis accélèrent les investissements en Europe centrale et orientale. En 1997, la Roumanie signait un partenariat stratégique avec les États-Unis pour stimuler son économie. La transition économique de ce pays de l’ancien bloc communiste a cependant pris plus de temps que prévu et les investissements américains n’ont pas été à la hauteur des attentes. C’est la guerre en Ukraine déclenchée par la Russie qui a placé la Roumanie dans le viseur américain. Les investissements d’Oncle Sam sont en plein essor en Roumanie, avec plus de sept milliards d’euros investis ces dernières années. Les neuf cent soixante entreprises membres de la Chambre de commerce américaine affichent un chiffre d’affaires de soixante-cinq milliards d’euros et ont créé plus de cent dix mille emplois. L’énergie, l’industrie militaire, l’informatique et l’agriculture sont les domaines prioritaires des investissements américains.

Rien qu’à Lasi, ville située dans le nord-est du pays, près de la frontière ukrainienne, un milliard d’euros d’investissements américains ont été attirés, créant douze mille emplois, dont quatre mille l’ont été par Amazon. À Brasov, au centre du pays, le gouvernement s’apprête à lancer la construction d’une usine de poudres à obus pour un investissement de quatre cents millions d’euros avec des capitaux américains et européens, la Commission européenne y participant avec quarante-sept millions d’euros. «D’ici à quatre ans, la Roumanie passera d’un produit intérieur brut de trois cent vingt à cinq cents milliards d’euros», a déclaré le Premier ministre social-démocrate Marcel Ciolacu. «De plus, le gaz de la mer Noire, l’énergie nucléaire et éolienne feront de la Roumanie l’Eldorado énergétique de l’Europe.»

Le tropisme américain de la Roumanie se manifeste surtout dans le secteur de l’énergie. Le gouvernement de Bucarest a autorisé la construction d’une usine de petits réacteurs modulaires (PRM) à Doicesti, petit village situé à une centaine de kilomètres au nord de la capitale. La société roumaine Nuclearelectrica a reçu le feu vert de la société américaine NuScale pour construire les premiers PRM qui produiront de l’énergie nucléaire avant 2030. Cet investissement américain de quatre milliards de dollars vise à transformer la Roumanie en un hub énergétique pour l’ensemble de l’UE. «Nous avons l’ambition d’être les premiers au monde à disposer de PRM et nous serons capables d’exporter cette nouvelle technologie», a déclaré le ministre de l’énergie Sebastian Burduja, un jeune formé aux universités de Harvard et de Stanford, comme d’autres experts roumains formés aux États-Unis. Le retour au pays d’une expertise formée à l’américaine renforce l’intérêt américain pour un pays prêt à tout pour faire face à la menace d’une Russie expansionniste. Et l’Oncle Sam a répondu présent à son appel.

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