#Parlement européen Le paquet énergie-climat Fit for 55 devrait permettre à l’Union européenne d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Les négociations vont commencer avec les Etats membres.
La lutte contre le réchauffement climatique est une des priorités de l’Union européenne (UE). En juillet et décembre 2021, la Commission européenne a présenté une vingtaine de propositions législatives – le paquet Fit for 55 – qui devrait permettre de réduire d’au moins 55% les émissions de gaz à effet de serre de l’UE en 2030 par rapport aux niveaux de 1990. L’objectif consiste également à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Il s’agit du plus grand paquet législatif depuis la création du marché unique et de l’euro.
Il a fallu deux séances plénières aux députés européens, en juin, pour trouver un accord sur cinq mesures phare du projet, après d’intenses mois de discussions. Car ces mesures vont transformer en profondeur l’économie européenne, mais aussi les modes de vie. Première mesure, l’une des plus emblématiques: la fin des véhicules thermiques à partir de 2035. Les voitures particulières et les camionnettes légères neuves ne devront plus émettre de CO2, ce qui revient à interdire la vente de véhicules à moteur thermique (essence et diesel), mais aussi hybride.
Le Parlement rappelle que les voitures personnelles, qui représentent 60,6% des émissions de CO2 du transport routier en Europe, sont l’un des principaux pollueurs. Les constructeurs automobiles ont fait pression pour repousser le plus loin possible la date butoir. Mais la date de 2035 a été maintenue: le cycle de vie d’une voiture étant estimé à quinze ans, il n’aurait pas été possible d’atteindre l’objectif de neutralité climatique en 2050. Une seule catégorie – les voitures de luxe – tire son épingle du jeu: un modèle produit à moins de mille exemplaires pourra avoir un moteur thermique. En vertu de l’amendement Ferrari voté par les députés.
Réforme du marché carbone
Deuxième mesure phare, la réforme du marché carbone. Depuis 2005, le carbone a un prix pour les industries. Dans le but de limiter les émissions de gaz à effet de serre, l’UE fixe une limite au nombre d’émissions autorisées et alloue des quotas aux industries les plus polluantes (production d’électricité, sidérurgie, ciment, aluminium) – le système ETS (Emission Trading System). Les industries peuvent s’échanger les quotas et certaines bénéficient de quotas gratuits pour éviter une délocalisation des activités en dehors de l’UE et une concurrence déloyale.
Le Parlement veut «inciter les industries à réduire davantage leurs émissions et à investir dans des technologies à faible émission de carbone». Le projet prévoit ainsi de réduire progressivement le nombre de droits à polluer et de programmer la fin des quotas gratuits - une réduction progressive qui s’étendra de 2027 à 2032. Il élargit également les secteurs concernés en y incluant le secteur maritime. Il propose enfin de créer un deuxième marché carbone pour les bâtiments et le transport routier à partir de 2024.
Autre mesure: la création d’un fonds social pour le climat, destiné à atténuer les effets de la réforme du marché carbone. Il aidera les citoyens les plus vulnérables et les petites entreprises à supporter le coût de la transition énergétique. Ce fonds pourrait financer des mesures d’aide directe temporaire au revenu (pour compenser le prix de l’énergie) et soutenir des investissements à la rénovation des bâtiments.
Une taxe carbone aux frontières
A partir de 2027, les quotas gratuits seront remplacés par une taxe carbone aux frontières de l’UE. Les entreprises qui ne sont pas soumises à un marché carbone dans leur pays devront payer une taxe pour pénétrer sur le marché européen. Le but est de leur appliquer le même prix du carbone que celui en vigueur dans l’UE. La Commission européenne voulait ne taxer que les cinq secteurs les plus polluants (la sidérurgie, le ciment, les engrais, l’aluminium et l’électricité). Le Parlement a voté pour un élargissement du champ d’application à tous les secteurs soumis à l’ETS.
Enfin, pour les députés européens, le secteur aérien doit participer à l’effort. Ce secteur est intégré au marché carbone ETS depuis 2012, mais 80% des quotas d’émission qui lui sont attribués sont gratuits. Le texte voté par le Parlement prévoit la fin de ces allocations gratuites d’ici à 2025. Le Parlement souhaite intégrer tous les vols long-courriers au départ de l’UE dans le système ETS – actuellement seuls les vols intracommunautaires sont concernés.
Rudes débats
Les débats ont été rudes, entre les députés qui trouvent que l’on ne va pas assez vite (les Verts) et ceux qui estiment que l’on avance trop vite (les conservateur du PPE). Le député Pascal Canfin (Renew Europe), président de la commission Environnement, avoue avoir subi un lobbying intense de la part des entreprises. La mise en œuvre de ces mesures ne se fera pas sans douleur. Rien que dans le secteur automobile, on peut s’attendre à la disparition d’une centaine de milliers d’emplois. Les entreprises devront faire un effort gigantesque d’adaptation. Nos modes de vie devront changer. Mais avons-nous le choix? L’impact du réchauffement climatique est de plus en plus perceptible. «Nous sommes tous confrontés aux mêmes défis et nous devons trouver le chemin pour avancer», insiste Pascal Canfin, qui souligne que le Parlement «fera tout pour conserver le niveau d’ambition» du texte voté en juin.
En effet, le débat n’est pas clos. Les négociations vont maintenant commencer avec les Etats membres. Elles promettent d’être difficiles.
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