#Taxe carbone L’Union européenne innove au niveau mondial et teste son fonctionnement interne.
Taxe carbone, ajustement carbone: les termes employés rendent compte de la complexité politique et économique de la manœuvre. Il y a d’abord la volonté de Bruxelles de réaffirmer l’existence du grand marché unique comme un ensemble cohérent; la référence à ses frontières extérieures y contribue largement. On note aussi le souci de réaffirmer les ambitions politiques communes des Vingt-sept, notamment en matière environnementale, alors que les politiques nationales protégeant la nature sont encore relativement disparates.
Du point de vue technique, une taxe environnementale est appelée à disparaître une fois le problème résolu. Dans ce cas précis, cela impliquerait que le reste de la planète adopte des comportements aussi vertueux que ceux prescrits par l’Union européenne, ce qui risque de prendre du temps.
En dépit des bonnes intentions affichées, les Etats-Unis restent très attentifs à tout ce qu’ils croient être une forme de protectionnisme, même s’ils le pratique parfois. Il en est de même pour la République populaire de Chine, qui se méfie des normes venues de l’Ouest et redoute un effet punitif sur ses exportations.
Implicitement, les spécialistes européens devront mesurer si leurs pays fournisseurs ont une politique environnementale proche de celle de l’Europe et analyser au niveau des secteurs d’activité quelles entreprises utilisent quelles technologies plus ou moins propres. Il ne sera pas facile d’établir la teneur exacte en carbone tout au long des chaînes de valeur. Au vu des coûts engendrés, on peut s’attendre à de solides contestations devant l’Organisation mondiale du commerce. Les nations s’estimant lésées crieront sans doute au protectionnisme. Mais, en sens inverse, les exportateurs européens se retrouveront dans une position inédite, puisque travaillant dans la zone du monde se déclarant la plus exemplaire. Il n’est pas certain que cette qualité les protège de coups tordus sur le marché global, aussi longtemps qu’il n’existe pas un prix unique du carbone sur la planète.
Les comptes
Une taxe environnementale a généralement vocation à être affectée au financement de mesures en faveur de l’environnement. Or, selon la version présentée, les quelque quatorze milliards d’euros annuels iront dans le budget général de l’Union européenne, ce qui peut priver la mesure d’une bonne compréhension dans les opinions publiques. Certes, l’Union européenne met en place son programme Green Deal débuté en 2019, un outil pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
D’ici là, le grand marché intérieur est toutefois largement importateur de carbone, non seulement en termes énergétiques, mais également dans des marchandises très ordinaires.
En ces temps de forte inflation, particulièrement dans la zone euro, les consommateurs et consommatrices sont attentifs aux prix. «La neutralité fiscale du prix du carbone est un prérequis pour son acceptabilité sociale», prévient le Conseil franco-allemand des experts économiques, dont les travaux ont nourri la décision européenne. «Or, toutes les observations empiriques montrent qu’il y a une forte perméabilité des taxes sur l’importation vers les consommateurs.» Pour conjurer la malédiction de l’impôt, il est possible de parler de contribution carbone au lieu de taxe. Cependant, cela requiert quand même une bonne explication technique du mécanisme et une adhésion politique à sa mise en œuvre.
En autorisant les services tiers, vous acceptez le dépôt et la lecture de cookies et l'utilisation de technologies de suivi nécessaires à leur bon fonctionnement. Voir notre politique de confidentialité.