Une initiative sur la biodiversité jugée trop extrême
Flavia Giovannelli
Publié mercredi 21 août 2024
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#Biodiversité Le peuple votera le 22 septembre sur l’initiative sur la biodiversité. Un texte combattu par une majorité d’acteurs, sans contreprojet.
L’urgence de la préservation de la biodiversité en Suisse a incité des organisations environnementales telles que Pro Natura, Patrimoine Suisse ou BirdLife à vouloir ancrer ce principe dans la Constitution.
Le 22 septembre prochain, les citoyens suisses seront appelés à se prononcer sur une initiative en faveur de la biodiversité, sans contre- projet. Une large coalition d’opposants, composée de nombreux partis politiques (dont le Centre, l’UDC, le PLR), ainsi que d’associations professionnelles, se mobilise contre ce texte, perçu comme une menace à d’autres activités essentielles. Albert Rösti, à la tête du Département fédéral de l’environnement, a récemment exprimé son opinion, soulignant que des efforts significatifs sont entrepris en matière de biodiversité. Il a rappelé que ces diverses mesures coûtent déjà près de six cents millions de francs par an à la Confédération.
Les répercussions potentielles de cette initiative sont vastes et préoccupantes. Elles toucheraient, entre autres secteurs, la production d’énergie, de denrées alimentaires, les forêts, les infrastructures touristiques dans les zones rurales, ainsi que la construction. Sur le plan politique, l’initiative porterait atteinte au fédéralisme, réduisant les compétences et la marge de manœuvre des cantons et des communes en transférant la mise en œuvre des politiques environnementales à la Confédération. Enfin, les pouvoirs publics pourraient être confrontés à des dépenses supplémentaires annelles de 375 à 440 millions de francs.
L'essentiel
L’équivalent de la surface de quatre cantons serait intouchable
Les auteurs du projet demandent que 30% de la surface du pays soit consacrée à la biodiversité; ils estiment que 8% est suffisamment protégé. Il manquerait donc une surface équivalant à celle des cantons de Berne, Fribourg, Neuchâtel et Soleure réunis. Dans ces zones supplémentaires, la production alimentaire serait soit interdite soit fortement limitée. Si les initiants reconnaissent qu’il reste des marges de manœuvre pour améliorer la situation, elle plaide pour une action axée non sur la quantité, mais sur la qualité de ces surfaces.
Le secteur agricole est passé à l’action
Le secteur agricole suisse s’efforce de préserver la biodiversité. Les agriculteurs sont légalement tenus de consacrer une partie de leurs terres à des surfaces de compensation écologique (prairies, haies, zones humides, etc.) pour fournir un habitat et de la nourriture à diverses espèces de plantes et d’animaux. La politique agricole fédérale inclut un catalogue d’aides. Entre 2008 et 2022, les subventions et autres transferts liés à l’environnement ont plus que doublé, passant de 1 à 2,3 milliards de francs, dont 38% sont destinés à des mesures en faveur de la biodiversité et des paysages. De nombreux agriculteurs participent également à des programmes et projets de recherche pour promouvoir des bonnes pratiques, comme l’initiative Résulterre, lancée à Genève ce printemps, qui vise à séquestrer le CO2 pour améliorer la qualité des sols. Enfin, une forte proportion d’agriculteurs a déjà adopté des pratiques biologiques, excluant les pesticides et autres engrais chimiques.
L’impact environnemental serait reporté à l’étranger
En limitant la production indigène de denrées alimentaires, d’énergie et de bois, l’initiative provoquerait un transfert de notre impact écologique à l’étranger, souvent dans des pays où les normes écologiques sont plus faibles. L’environnement de la planète n’en tirerait aucun bénéfice réel.
L’intérêt touristique n’est pas pris en compte
L’initiative imposerait des restrictions au développement d’infrastructures (pistes de ski, remontées mécaniques, hôtels, etc.), ce qui nuirait à la capacité d’accueil et à la croissance du secteur touristique, déjà confronté à une augmentation des coûts et à une concurrence étrangère accrue.
Résumé des enjeux
L’initiative soumise à votation a le mérite de relancer le débat sur des questions cruciales, sachant que la Suisse peut mieux faire en matière de biodiversité, selon les classements internationaux. L’approche des initiants est cependant jugée extrémiste, rigide, redondante et coûteuse. Les nouvelles réglementations et restrictions proposées risquent d'augmenter les coûts pour de nombreux acteurs économiques. En fin de compte, cela pourrait freiner la croissance économique et réduire la compétitivité de certaines entreprises, alors qu’un équilibre global devrait être trouvé.
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