Grand glacier d’Aletsch. Long de 23 kilomètres, il couvre une surface de 80 kilomètres carrés. Il compte onze milliards de tonnes de glace. Il se réduit de cinquante mètres par an.
L’Organisation des Nations unies (ONU) a proclamé 2025 Année internationale de la préservation des glaciers, marquant un tournant symbolique et opérationnel dans la lutte contre leur disparition.
La première journée mondiale des glaciers, combinée à la journée mondiale de l’eau, sera célébrée lors d’un événement de haut niveau organisé à New York et à Paris les 20 et 21 mars 2025. Plusieurs manifestations sont prévues à travers le monde, notamment à la Jungfrau pour la Suisse.
La campagne internationale de 2025 mettra en lumière les multiples impacts du recul glaciaire sur les communautés et les écosystèmes en aval. Elle soulignera l’urgence de développer des stratégies d’adaptation dans les zones touchées, de renforcer la coopération transfrontalière et d’impliquer les communautés locales. En parallèle, elle insistera sur l’importance de réduire significativement la consommation de combustibles fossiles.
Cette initiative s’adressera également aux jeunes générations, tout en s’intégrant à la décennie d’action pour les sciences cryosphériques (2025-2034), pour encourager la recherche et les solutions innovantes.
Daniel Farinotti est professeur en glaciologie a l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich et à l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage à Sion, où il analyse le changement des glaciers dû au réchauffement climatique et les impacts associés.
Il estime que cette décision de l’ONU est une avancée intéressante. «En officialisant une problématique à l’échelle mondiale, l’ONU lui donne une visibilité sans précédent, incitant associations et organisations à agir», affirme-t-il. Les glaciers jouent un rôle essentiel dans la régulation du climat mondial et la fourniture d'eau douce, une ressource vitale pour des milliards de personnes. Or, en raison du changement climatique, principalement dû aux activités humaines depuis les années 1800, ces réservoirs naturels disparaissent à une vitesse alarmante. «Avec ses montagnes, la Suisse est directement concernée, sachant qu’au cours des trois dernières années, la masse totale des glaciers du pays a diminué d’environ 13%», alerte Daniel Farinotti, qui établit un parallèle frappant: «Dans le monde de l’économie, un dirigeant responsable de telles pertes serait immédiatement licencié».
Pour autant, il reste convaincu qu’il n’est pas trop tard pour agir. Si la fonte des glaciers est bien entamée, des mesures ambitieuses pourraient encore préserver une partie de ces ressources. Le levier principal demeure la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. En respectant les Accords de Paris et en limitant le réchauffement climatique à 2°C, la fonte des glaciers pourrait être contenue à 60% d’ici à 2100. En revanche, sans action significative, la Suisse pourrait bien voir tous ses glaciers disparaître.
À plus court terme, le recul des glaciers menace également l’économie locale. La Suisse a forgé une économie touristique florissante, fortement tournée vers les sports d’hiver. Au-delà de l’image symbolique des glaciers, leur fonte estivale joue un rôle clé en alimentant les systèmes hydriques essentiels à l’agriculture et à l’industrie. Une diminution de leur masse entraînera des apports d’eau réduits, augmentant les risques de sécheresse et d’épisodes de pluies violentes et irrégulières. L’instabilité des sols liée au dégel du pergélisol - ou sol gelé en permanence - accroîtra les risques d’éboulements et de glissements de terrain. Quant à la production d’énergie, bien que le recul glaciaire ait un impact sur les réserves d’eau, Daniel Farinotti se veut rassurant: grâce aux barrages suisses, il restera possible de stocker et d’utiliser l’eau de pluie pour pallier ces déficits – du moins en partie.
Une responsabilité intergénérationnelle
Si le tableau paraît sombre, le spécialiste veut transmettre un message d’espoir: «En prenant les bonnes mesures, nous pouvons encore agir. Le destin des glaciers n’est pas entièrement scellé». Rejoignant l’appel de l’ONU, il souligne l’importance de faire connaître le rôle crucial des régions montagneuses dans la fourniture d'eau douce et la préservation des écosystèmes mondiaux. Pour les scientifiques, il en va aussi d’une question de responsabilité intergénérationnelle.
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