«Le chèque de 300 francs est trop coûteux»

Steven Kakon
Publié vendredi 31 octobre 2025
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#Votation soins dentaires L’initiative populaire genevoise soumise au vote le 30 novembre est soutenue par l’Association des médecins-dentistes, qui plaide pour la création d’un poste de médecin-dentiste cantonal.

Faut-il verser un chèque dentaire annuel de 300 francs aux personnes bénéficiant de subsides à l’assurance maladie et créer un poste de médecin-dentiste cantonal à Genève? Ce sont les deux principales propositions de l’initiative populaire genevoise Pour des soins dentaires accessibles à toute la population (IN 193), soumise à votation le 30 novembre prochain. Déposé par le Parti socialiste, le texte vise à lutter contre le renoncement aux soins dentaires en introduisant un bon annuel de 300 francs, en instaurant un poste de médecin-dentiste cantonal, et en lançant un plan d’action cantonal en matière de santé bucco-dentaire.
En parallèle, le contre-projet formulé par le Grand Conseil sera également soumis au vote. Celui-ci inscrit dans la loi sur la santé des mesures de prévention et de soins bucco-dentaires, sans volet financier ni création de poste spécifique. Les initiants estiment le coût du chèque de 300 francs à quarante-cinq millions de francs par année, si tous les bénéficiaires potentiels en font la demande. Cent cinquante mille personnes, soit 30% de la population, étaient concernées par la mesure en avril 2024. Un nombre qui a augmenté depuis. Trop cher, considèrent les opposants à l’initiative, parmi lesquels la FER Genève.
Ils jugent également cette mesure administrativement lourde et probablement peu efficace. Son efficacité est en effet mise en doute au vu des expériences connues avec l’envoi du bon adressé à tous les parents des élèves du Cycle d’orientation pour effectuer un contrôle gratuit annuel chez un hygiéniste dentaire ou un dentiste. Le rapport du Grand Conseil appuie cet argument: seuls 5% des parents qui reçoivent ce bon pour leur enfant l’utilisent.

Médecin-dentiste cantonal

Quant à la création d’un poste de médecin-dentiste cantonal à temps partiel (son pourcentage n’étant pas déterminé), les initiants veulent suivre la voie des vingt cantons qui en sont dotés, à l’exception de Genève, Appenzell Rhodes Intérieures, Berne, Neuchâtel, Schaffhouse et Zoug. Stéphanie Ruegsegger, directrice du département de politique générale de la FER Genève, résume la position de l’institution, qui soutient le contre-projet. «Nous nous opposons à l’initiative en raison du chèque de 300 francs dont le coût serait trop élevé, mais n’avons pas d’objection de principe concernant la création d’un poste de médecin-dentiste cantonal.»
L’Association des médecins-dentistes de Genève (AMDG), représentant près de la moitié des cabinets de médecins-dentistes du canton et membre de la FER Genève, soutient fermement la création de ce poste. Son président, le spécialiste en parodontologie Raphaël Moëne, explique pourquoi ci-dessous.


«Il faut un interlocuteur capable de parler à l’ensemble de la profession»

Pourquoi vouloir un poste de médecin-dentiste cantonal?
Il manque à Genève une personne qui centralise tout ce qui a trait à la médecine dentaire. De nombreux dentistes non-membres de notre association se soustraient à certaines règles, comme la déontologie et l’interdiction de publicité pour inciter à des traitements. Il faut un interlocuteur unique, compétent en médecine dentaire, capable de dialoguer avec l’ensemble de la profession et de diffuser l’information. Nous pouvons parler à nos membres, mais pas aux cabinets qui ne sont pas chez nous. L’objectif est aussi de coordonner l’accès aux soins dentaires, notamment pour les patients précaires. De nombreuses aides existent - Hospice général, prestations complémentaires, Croix-Rouge, fondations privées - mais elles sont mal connues et peu connectées entre elles. Un médecin-dentiste cantonal pourrait orienter les patients et faire le lien entre les acteurs.

Les opposants à l’initiative estiment que le service du médecin cantonal peut mener la mission d’établir et de suivre un plan d’action en matière de prévention et de promotion de la santé dentaire.
Il faut mettre en place une personne qui connaît spécifiquement le milieu dentaire, qui pourrait être rattachée au service du médecin cantonal. Sans cela, il est difficile de raccourcir les délais de traitement des dossiers et d’être plus efficace. Le contre-projet ne répond pas à cette problématique.

Que pourrait-on faire de mieux en matière de prévention?
Il faudrait inciter davantage les contrôles dentaires chez les enfants. Des actions sont déjà entreprises dans ce sens au travers du bon offert aux enfants au Cycle d’orientation et des actions de prévention dans les écoles primaires.

Constatez-vous un renoncement aux soins dans votre activité de dentiste?
Je constate que certains patients tardent pendant plusieurs années à effectuer un traitement. Pour des raisons financières ou aussi par peur du dentiste. Le renoncement total est très rare, car les gens sont conscients qu’à partir du moment où on commence à perdre des dents, les coûts sont plus importants. 

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