La gestion des arbres en milieu urbain est un défi quotidien

La gestion du parc arborisé en ville est complexe: elle pose des questions stratégiques, économiques et politiques.
La gestion du parc arborisé en ville est complexe: elle pose des questions stratégiques, économiques et politiques.
Flavia Giovannelli
Publié vendredi 07 octobre 2022
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#Arbres Grâce à leur canopée, les arbres offrent des îlots de fraîcheur et participent au bien-être de la population. Le sujet s’avère à la fois émotionnel et politique.

La thématique des arbres en ville est sensible. Dans un canton fortement densifié, qui a eu longtemps tendance à privilégier la construction d’immeubles, chaque décision d’abattage crée l’émoi. On sent une inflexion des priorités. En 2020, dans son plan d’investissement pour la transition climatique, Antonio Hodgers annonçait d’ailleurs son intention de planter cent cinquante mille arbres sur une période de dix ans.

Reste à savoir comment mettre en pratique une gestion intelligente du parc arboré, qui pose de multiples questions stratégiques, économiques et botaniques. Tout d’abord, il faut tenir compte d’un arsenal de dispositions réglementaires qui contraignent beaucoup l’action (lire ci-dessous). Du côté des professionnels, le mot d’ordre est simple: il faut se donner les moyens pour que les options soient le plus durables possible. «Nous ne plantons pas des arbres pour aujourd’hui, mais pour dans vingt ans», commence Vincent Compagnon, administrateur des Pépinières genevoises et président de l’association Jardin Suisse Genève. Avec le recul, il sait combien il est difficile de se projeter: «Dans les années 2000, on a commencé à privilégier les espèces indigènes, c’est-à-dire d’origine continentale européenne, lorsqu’il fallait remplacer les espèces exotiques. Quelques années plus tard, on s’est aperçu qu’il fallait mettre l’accent sur la lutte contre certaines plantes trop invasives, comme les thuyas ou les lauriers. Récemment, on a dû encore rectifier la stratégie, cette fois en cherchant les meilleurs végétaux capables de s’adapter au climat du futur», résume-t-il.

Arbres d’avenir

C’est une course contre la montre qui s’est engagée, sachant que toute l’Europe arrive aux mêmes conclusions. Les pépiniéristes voyagent donc pour tenter de trouver les essences qui seront les plus compatibles avec le climat, sachant que celui de Genève ressemblera de plus en plus à celui qu’on connaît dans les Balkans, avec des étés chauds et secs, et des hivers potentiellement froids. Dans ces conditions, l’offre se raréfie et les prix montent, aggravés par les surcoûts liés à la crise énergétique.

Face à cette situation, les tests réalisés à l’échelle locale gagnent en importance. En parcourant la pépinière, à Bernex, Vincent Compagnon montre des essais qu’il couve jalousement. Des marronniers jaunes, provenant de l’est des Etats-Unis, ou une variété de chênes provenant du sud de l’Italie, lui semblent assez prometteurs. «Il y a toujours des risques d’échec et ces cultures, partant de plants si jeunes, demandent beaucoup de patience», avertit-il. Dans sa nurserie, les arbres sont encore en pots et ne dépassent pas quarante centimètres de hauteur.

En outre, il faudra encore réussir avec succès la deuxième étape, à savoir l’implantation définitive. «La nature n’a pas prévu de déplacer les végétaux; c’est une intention humaine, donc il nous appartient de le faire le plus respectueusement possible», observe le pépiniériste. Il faut commencer par attendre que les plants soient suffisamment forts et les déplacer de préférence vers la fin de l’automne, quand la végétation se met en mode latent. La question de l’entretien des arbres à long terme ne doit pas être négligée. Ceux qui sont gourmands en eau, par exemple, engendreront des frais supplémentaires. A titre d’exemple, de nombreuses communes genevoises cherchent des arbres de type méditerranéen, comme les micocouliers. S’ils semblent avoir le bon profil, ces arbres nécessitent néanmoins des arrosages abondants. L’avenir dira si cette option est la bonne. Conscient que la mission n’a rien de simple, Vincent Compagnon conclut: «Dans un certain sens, on vit une période de regain d’intérêt pour les végétaux depuis la pandémie et c’est positif. Reste encore à faire comprendre au public qu’un espace vert n’est pas un décor. Il est fait pour évoluer, avec toutes les contraintes que cela implique».

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