Promesses et illusions de la santé connectée

 La santé connectée doit prouver qu’elle améliore la prévention.
La santé connectée doit prouver qu’elle améliore la prévention. Adobe stock
Steven Kakon
Publié mardi 09 décembre 2025
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#Innovation De la bague intelligente à l’agent conversationnel médical, la santé numérique s’impose. Mais derrière l’enthousiasme, des questions persistent: l’utilité réelle de ces objets et le risque de gadgetisation.

Montres, bagues, balances connectées, etc.: l’intelligence artificielle s’invite dans notre quotidien avec la promesse de nous aider à être en bonne santé. Derrière cet enthousiasme, certains experts appellent à la prudence. «On a l’impression qu’en se pesant sur une balance connectée, on va perdre du poids», ironise Jean Gabriel Jeannot, médecin et spécialiste du numérique, au Forum Santé organisé par Le Temps le 25 novembre à Lausanne.
Pour lui, le marketing occupe une place disproportionnée dans ce secteur, au détriment de l’efficacité réelle de ces outils, qui tendent à devenir des gadgets.
Lors de cette table ronde dédiée à la relation entre technologie et santé, Idris Guessous, médecin chef du service de médecine de premier recours et responsable du centre de l’innovation aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), était invité à présenter «confIAnce», un agent conversationnel basé sur la documentation médicale du Service de médecine de premier recours.
Disponible vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, il vise à prolonger le dialogue entre deux consultations sans toutefois poser de diagnostic. Ses réponses s'appuient sur la documentation médicale du Service de médecine de premier recours des HUG.

Utilité

Une innovation est saluée par Jean Gabriel Jeannot. «Cet outil est intéressant, car il donne plus d’autonomie au patient.» Il rappelle cependant que la plupart des objets connectés ne sont pas des dispositifs médicaux validés. «Il y en a très peu dont l’utilité a été prouvée», insiste-t-il.
La start-up Senbiosys, issue de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, illustre la course à la miniaturisation avec une bague intelligente capable de collecter des données physiologiques pour surveiller sa santé. «Nous sommes encore en phrase de test», fait savoir Assim Boukhayma, cofondateur de Senbiosys. Il décrit la bague avec fierté: «elle est aussi fine et discrète qu’une alliance», avant de souligner qu’«elle se connecte au smartphone à la demande». Si la prouesse technologique est indéniable, le docteur Jeannot pose une question essentielle: que faire de ces données? «Pour qu’une donnée soit utile en santé, elle doit être précise et interopérable, c’est-à-dire pouvoir circuler dans le système de santé. Or, ce n’est souvent pas le cas.»

Améliorer la prévention?

Animateur de la discussion, le journaliste Anouch Seydtaghia pointe un autre enjeu, celui de rendre les données compréhensibles pour le grand public. «J’ai testé la bague connectée de la marque Samsung, qui mesure de nombreux paramètres, et je me suis trouvé face à une série de graphiques et d’acronymes dont j’ignorais la signification», confie-t-il. Assim Boukhayma répond que de mettre l’utilisateur face à ces données n’est pas l’objectif. Il assure que «de notre côté, nous essayons d’établir un rapport mensuel sur lequel on souligne les bons points et les points à améliorer». Les données présentées y sont synthétisées. Promesse ou mirage? La santé connectée doit prouver qu’elle améliore la prévention.

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