Un drone pour récolter de l’ADN sur la canopée

Le drone ouvre de nouvelles perspectives en matière de recensement des espèces.
Le drone ouvre de nouvelles perspectives en matière de recensement des espèces. EPFL
Flavia Giovannelli
Publié vendredi 03 mars 2023
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#Technologie Des scientifiques de l’Institut fédéral de recherches WSL et de l’école polytechnique de Zurich réunissent leurs compétences.

Jusqu’à tout récemment, il fallait être un grimpeur téméraire pour récolter des échantillons d’organismes au sommet des arbres, surtout dans les forêts touffues ou dans la jungle. Or, il s’agit d’une source très précieuse d’informations, qui permet de recenser les espèces qui les habitent. «Ces traces génomiques nous servent à faire l’inventaire et la surveillance de la biodiversité, mais un tel environnement rendait ce défi compliqué», raconte Loïc Pellissier, responsable de l’évolution des microsystèmes et de l’environnement à l’Institut fédéral de recherches WSL et professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ).

Or, une avancée technologique récente ouvre de nouvelles perspectives. En association avec Stefano Mintchev, professeur et spécialiste de la robotique à l’EPFL, une équipe scientifique mixte a réussi à mettre au point un drone capable de collecter de manière autonome des échantillons sur les branches des arbres. «Nous nous sommes inspirés des méthodes utilisées par la police scientifique lorsqu’il s’agit de chercher des traces sur un site précis. Après quelques essais, nous avons équipé un drone de bandes adhésives auxquelles des fragments de matériel vivant restent collés lorsque l’engin se pose sur une branche», détaille Loïc Pélissier. Ensuite, il suffit d’en extraire l’ADN en laboratoire afin de l’analyser. La troisième étape consiste à déterminer quels sont les organismes présents en les comparant à ceux enregistrés dans les bases de données. L’innovation, qui vient d’aboutir, a fait l’objet d’une publication dans la revue Science Robotics.

Développement complexe

Si la solution brille par son apparente simplicité, il a fallu résoudre des questions complexes pour y parvenir. En effet, toutes les branches sont différentes les unes des autres, ne serait-ce que concernant leur épaisseur et leur élasticité. Le défi consistait donc à programmer le drone de manière à ce qu’il puisse se poser de manière autonome sur une branche et y rester immobile assez longtemps pour y collecter des échantillons. Initié il y a environ deux ans, le projet permet à la petite équipe de participer à la demi-finale d’un concours qui aura lieu en mai 2023 à Singapour.

Les participants devront relever le défi consistant à recenser le plus grand nombre possible d’espèces différentes en 24 heures, dans une zone de cent hectares de forêt tropicale. Pour l’heure, les performances du drone doivent encore être améliorées. «Nous avons commencé des tests dans la halle tropicale du Zoo de Zurich, un site idéal, car nous savons quelles espèces sont présentes», observe Loïc Pélissier. Dans une forêt tropicale naturelle, la collecte pose des défis plus importants pour les chercheurs, comme la pluie et le vent, qui entravent la collecte des échantillons. Résulta:, le drone suisse devra devenir encore plus efficace et plus rapide pour espérer remporter la mise.

Au-delà de la prouesse technologique, cette invention devrait permettre des avancées concrètes dans de nombreux domaines, y compris en Suisse. Par exemple, le drone pourrait être très utile pour rassembler le plus vite possible de l’ADN provenant de grandes surfaces agricoles. Ces données d’exploitation seront un outil précieux pour l’étude de diverses questions en rapport avec les fonctions du sol et les menaces qui le concernent, ou encore pour l’optimisation d’engrais ou de produits phytosanitaires.

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