Permis de travail: «Genève fait face à un grand nombre de demandes»
Tania Albertani, directrice du service étrangers de l’Office cantonal de la population et des migrations.
SK/Entreprise romande
Steven Kakon
Publié vendredi 31 janvier 2025
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#Permis de travail
A Genève, l’attente d’un permis de travail ou de son renouvellement peut durer plusieurs mois. Pourquoi, et quelles implications pour les personnes en emploi ou en recherche d’emploi?
A l’Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) de Genève, des dysfonctionnements chroniques ont été dénoncés par la Cour des comptes en décembre dernier. De longs temps d’attente avant d’obtenir un permis de travail ont été observés. Tania Albertani, directrice du service étrangers de l’OCPM, s’explique sur ces délais et apporte son éclairage sur les questions que peuvent se poser employeurs et employés.
Pourquoi une demande ou un renouvellement de permis de travail peuvent-ils prendre plusieurs mois à Genève?
C’est essentiellement dû au volume des demandes: nous en recevons énormément, ce qui reflète l’attractivité économique du canton. Le deuxième élément, c’est si la demande est complète ou non. De plus, plusieurs acteurs peuvent entrer en jeu. Par exemple, pour une personne extra-européenne avec activité lucrative, l’Office cantonal de l’inspection et des relations du travail (OCIRT) intervient1. Parfois, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) doit aussi donner son approbation, ce qui peut rallonger le délai.
Il y a donc une différence du traitement des demandes selon qu’elles émanent de citoyens européens ou non européens?
Cela dépend. S’il s’agit d’un permis de séjour dont le seul but est l’activité lucrative d’un ressortissant extra-européen, c’est l’OCIRT, dont le rôle est de réguler le marché du travail, qui est compétent pour délivrer les autorisations de travail, sur la base des quotas fixés par la Confédération. Les extra-Européens sont soumis à la loi sur les étrangers et l’intégration, alors que les Européens sont soumis à l’accord sur la libre-circulation des personnes.
Comment expliquer que les procédures sont plus rapides dans d’autres cantons?
Les cantons ne font pas face au même volume de demandes. Nous sommes tous soumis aux mêmes bases légales, mais en termes d’organisation, chaque canton a sa propre règlementation. A Genève, tout dépôt de demande est centralisé à l’OCPM, rien n’est délégué aux communes, à la différence d’autres cantons.
Prenons le cas d’un citoyen extra-européen qui a une proposition de travail en Suisse. Le système de contingent s’applique-t-il?
Ce qui compte, c’est le but du séjour en Suisse. Les extra-Européens qui arrivent avec le regroupement familial ont accès au marché du travail sans passer par les contingents. Ceux qui cherchent du travail ou ont une proposition d’emploi sont soumis au système des quotas.
Le délai d’attente est-il le même selon qu’il s’agit d’une première demande ou d’un renouvellement?
Il peut y avoir des différences de traitement, mais ce qui compte, en plus du nombre d’institutions compétentes pour l’octroi du permis, c’est la complexité de la demande et si elle est complète ou non.
Quel est le délai moyen d’un renouvellement de permis?
Si la personne utilise l’avis de fin de validité qui lui est envoyé trois mois avant la date d’expiration du permis, cela crée des automatismes: dans ce cas, le délai est de trois mois environ.
Est-il possible d’engager une personne dont le permis est en cours de renouvellement?
Les personnes en possession d’un titre de séjour leur permettant de travailler en cours de renouvellement sont en droit de travailler même si leur permis est arrivé à échéance. Les permis C (autorisation d’établissement octroyée après un séjour de cinq ou dix ans en Suisse - ndlr) ont une durée de cinq ans, mais sont valables pour une durée indéterminée tant que l’autorité n’a pas prononcé leur révocation. Dès le moment où une demande de prise d’emploi complète est déposée à l’OCPM par une personne européenne, cette dernière a le droit de travailler, sous réserve des professions réglementées qui nécessitent des autorisations spécifiques. De nombreux employeurs méconnaissent ces éléments.
Et pour le permis B?
Une personne dont le permis B (autorisation de séjour des ressortissants des Etats membres de l’UE/AELE - ndlr) lui permettant de travailler est en cours de renouvellement a le droit de travailler. Des conditions sont parfois dictées par l’OCIRT. Les employeurs, pour ne prendre aucun risque, peuvent prendre contact avec l’OCPM afin de s’assurer qu’ils peuvent maintenir l’emploi ou engager quelqu’un.
Quelles sont vos recommandations aux demandeurs de permis pour accélérer la procédure?
Nous encourageons les personnes et les entreprises à déposer leur demande en ligne via les e-démarches, car elles sont guidées et leur demande arrive au bon endroit et, normalement, complète, ce qui représente un gain de temps. Les employeurs ont aussi la possibilité de créer des comptes entreprise. Ainsi, au lieu de payer pour chaque permis, ils peuvent payer une facture mensuelle. Ensuite, le numéro de dossier attribué aux demandes en ligne facilite le suivi en cas de question.
1 L’OCIRT est compétent pour rendre une décision préalable avant toute prise d’emploi. Il présente la requête pour préavis à la commission tripartite (composée de membres représentant les employeurs, les employés et l’Etat), selon les types de demande.
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